Par Marjorie Ansion
Pour la troisième édition de Médias en Seine, le festival international des médias de demain qui a eu lieu ce jeudi 19 novembre, pas moins de 80 conférences pour plus de 150 intervenants se sont enchaînées tout au long de la journée, à travers une retransmission numérique. Le Connecteur a suivi pour vous plusieurs de ces moments et partage ce qu’il fallait retenir.
Aujourd’hui, un nom prend le devant de la scène : Twitch. Incontournable dans l’univers du gaming – des jeux vidéo -, la plateforme de streaming explose et devient incontournable dans le champ médiatique. Son vice-président pour l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique, Damian Burns, était l’invité de Médias en Seine, pour un échange avec Jérôme Cadet, journaliste à la direction des Sports de Radio France.
Présenté comme “l’un des nouveaux acteurs médiatiques mondialisés”, la question de la place de cette plateforme de streaming ne se prend pas à la légère. Si de nombreux médias soufflent leur centième bougie, Twitch, lui, est la jeune pousse de ce monde. La plateforme a été créée il y a moins de dix ans aux Etats-Unis. A ses débuts, elle diffusait exclusivement de l’e-sport. Rachetée par Amazon, pour la somme d’un milliard de dollars, elle s’est par la suite diversifiée pour accueillir aujourd’hui pas moins de 17,5 millions de visiteurs par jour, du monde entier, sur des sujets aussi larges que différents.
Avec son côté interactif, les personnes qui regardent un live peuvent également faire des dons à l’auteur de la vidéo et laisser des commentaires. Soit un parfait mélange de streaming, de réseaux sociaux et de cagnottes combinés en un seul mot : Twitch.
Une plateforme utilisée par les politiques et les gouvernements
Un lieu tellement hétérogène, que “ces derniers mois, on a pu voir des personnalités comme Gaël Monfils le joueur de tennis français, ou Jean-Luc Mélenchon le leader de la France insoumise sur Twitch”, constate Jérôme Cadet. Pour mesurer son importance, il faut voir au-delà des frontières et constater que la plateforme a, il y a quelques jours, “incité les Américains à aller voter à l’élection présidentielle”.
Aujourd’hui, Twitch est utilisé comme un relais officiel d’informations. “Le Royaume-Uni l’utilise pour faire ses annonces du Covid-19 pour avoir une interaction avec les habitants”, note le vice-président.
Maintenant une grande partie de notre public est les milléniums, mais pas que. Un tiers de notre public a plus de 35 ans et c’est quelque chose qui est très largement distribué aussi entre hommes et femmes
Damian Barns
C’est d’ailleurs la pandémie qui a accéléré l’explosion de la plateforme selon Damian Burns. « Ça a été un vrai challenge pour le monde de faire face à cette pandémie et je pense que les gens qui se retrouvent confinés chez eux recherchent des connexions, des communautés et donc utiliser cet environnement permet de retrouver ces connexions. Les quatre premières semaines de confinement nous avons vu plus de 50 % de personnes qui sont arrivés sur la plateforme avec des heures de visionnage. Les gens sont venus en nombre et les utilisateurs d’avant l’ont utilisé encore plus qu’avant.”
Si Twitch s’adressait à ses débuts aux gameurs, sa cible actuelle prouve qu’il est devenu un canal de diffusion incontournable. “Maintenant une grande partie de notre public est les milléniums, mais pas que. Un tiers de notre public a plus de 35 ans et c’est quelque chose qui est très largement distribué aussi entre hommes et femmes. Nous avons un public très varié.”
Un modèle économique innovant et alternatif
Pour que tout cela tienne, la plateforme a trouvé son équilibre financier grâce à deux piliers : “D’un côté la publicité traditionnelle de trente secondes que l’on ne peut pas passer. Et il y a aussi un modèle d’abonnement. On peut s’abonner à certaines personnes. On peut acheter des biens virtuels pour montrer sa gratitude vis-à-vis du streamer sous forme de cadeaux. C’est un écosystème absolument incroyable, car ce n’est pas seulement une source de revenus pour Twitch, mais pour tous les gens sur la plateforme qui sont nos partenaires.”
Au-delà d’être un relais d’information et de rassemblement, la plateforme se présente même comme une alternative économique pour les artistes à l’heure du confinement. A cette question, si le vice-président explique que la plateforme n’a pas mis en place de moyens de concerts de paiement, ce fonctionnement de dons permet à l’auteur d’une vidéo de gagner de l’argent. “Les artistes ont des tas d’outils monétaires à leur disposition et on s’aperçoit que les fans de ces artistes montrent leur passion et leur amour pour en faisant des dons ou en prenant des abonnements. Mais du point de vue de concerts payants, nous n’avons rien de prévu pour l’instant.”