En se baladant dans les allées du Sommet et en jetant un œil au [dense] programme de conférences, on ne peut pas se tromper d’époque : la transition écologique est partout, parfois comme un argument de vente de nouveaux équipements ‘moins énergivores’ et plus souvent comme une démarche de fond.
A moins de vivre dans un autre espace temps, on sait bien la période est difficile pour le monde agricole : Agribashing oblige, l’éleveur ou le grand céréalier est montré du doigt pour ses pratiques intensives, son absence présumée de sensibilité au bien être animal, ses effluents pollueurs … et dans le même temps, l’agriculture est elle-même présentée comme une solution d’avenir avec notamment ‘les puits de carbone’ (lire l’article de Futura Sciences à ce sujet)
Ce paradoxe, cette injonction contradictoire, était parfaitement illustré par la conférence « On se met au carbone » organisée par l’Institut de l’élevage. Les agriculteurs ont un immense défi à relever mais aussi plein de raisons d’y parvenir.
Vous connaissez le concept ‘d’effet rebond’ mis en évidence par le chercheur Stanley Jevons (en 1865 à propos du Charbon !) ? Parce que, vraiment, en matière d’agriculture comme dans beaucoup de secteurs, on est en plein dedans.
Devant un auditoire majoritairement jeune dans une salle débordante, la conférence était structurée autour d’un grand QCM, chaque question et propositions de réponses étaient alors l’occasion de faire le point sur les croyances … et de les remplacer par des données factuelles.
L’agriculture, demain un contributeur positif
- La contribution de l’élevage aux émissions de GES en France est de 10% en 2018 (17% pour l’agriculture, 29% pour les transports, 19% pour le résidentiel…) , ce chiffre a baissé de 11% en 20 ans et devra baisser encore de 46% pour respecter les objectifs de la stratégie France bas carbone d’ici 2050. Le secteur pourrait même devenir neutre voire contributeur « compensateur » notamment grâce aux puits de carbone
- Oui, le changement climatique a un impact sur l’élevage laitier, les fortes températures font baisser la productivité des vaches, dégrade le rendement des surfaces herbagères (grillées en plein été) et allongent mais en les ‘hachant’ les périodes de pâturage
- Le gaz à effet de serre le plus produit est le méthane (CH4) : c’est celui qui est généré par la fermentation entérique lors de la digestion de la cellulose, d’autres (ne rentrons pas dans les détails, vous n’êtes sans doute pas un expert agricole non plus) sont liés à la consommation d’énergie sur l’exploitation ou à la production et au transport de ses intrants, ou encore aux process de fertilisation des sols …
- Les potentiels systèmes fourragers (mais, herbe, mixte, concentrés…) ne sont pas très différenciés en termes de contributions aux émissions
Et finalement, tout est là, dans l’équilibre. Les études menées par l’Institut de l’Elevage montrent une corrélation directe entre performance économique et impact écologique positif. C’est sans doute un beau sujet à débat, mais l’ensemble des leviers actionnables pour réduire son empreinte écologique sont des leviers économiquement et socialement vertueux :
- Un troupeau en bonne santé, c’est un effectif productif optimal et donc un niveau de productivité performant
- Une gestion fine de la valorisation des effluents c’est aller vers plus d’autonomie et moins d’intrants, (écouter à ce sujet le podcast de la Terre au Carré du 2 octobre l’interview de Ludovic Mazars le président de l’association Methan’Aubrac à 29’55’’)
- Une rotation des parcelles qui permet de réduire les traitements, moins d’intrants et plus de biodiversité.
En résumé, il faut changer de logiciel, et cela prend du temps : question de culture, de changement de pratiques, de formation, et … d’outils aussi et ça, c’est un vrai champ d’innovation !