La Maison de l’Architecture en Auvergne a récemment organisé son 4ème « Bistrot d’Archi”. Ce format donne la parole à un expert ou un chercheur sur une thématique particulière. Pendant les prises de parole, les participants peuvent siroter un verre. Pour cette édition, les amateurs d’architecture, de patrimoine et d’urbanisme ont pu découvrir les travaux réalisés par trois chercheuses. Bénédicte Chaljub et Amélie Flamand et Brigitte Ceroni, ont présenté leurs travaux autour des cités Michelin et de leur potentiel futur.
Un territoire maillé par les cités Michelin
Le travail d’inventaire et de recensement de Brigitte Ceroni, du Service Régional de l’Inventaire d’Auvergne a été particulièrement instructif pour comprendre « l’emprise de Michelin » sur la ville de notre territoire. La première à voir le jour est celle située dans le quartier de Montferrand. Elles s’étendent ensuite sur toute l’avenue de la République, qui est à l’époque, vierge de toute construction. L’inventaire a fait apparaître quarante-six lieux d’habitations s’étendant de Clermont-Ferrand à Mozat.
Grâce à la contribution de professionnels du paysage, de la botanique et du graphisme, une vision complète et pluridisciplinaire de ces lieux emblématiques a été esquissée.
L’inventaire en ligne à venir offrira une mine de renseignements, y compris des cartographies détaillées et les plans originaux des maisons.
Ce projet s’est appuyé sur une méthodologie rigoureuse, incluant des enquêtes sur les archives, des relevés de jardins, des entretiens avec les habitants et les acteurs des services patrimoines et urbanisme, ainsi que l’observation de la faune et la flore locale. Cela a permis de révéler le riche écosystème que ces cités abritent – une biodiversité incluant des oiseaux, des reptiles et des mammifères.
Début du 20ème siècle : Michelin est l’ultra croissance
A la fin du 19ème siècle, Michelin comptait moins de 1000 ouvriers. En 1929, le nombre de 26 000 ouvriers est atteint. Il est donc devenu nécessaire de construire des logements pour les salariés de l’entreprise car le centre-ville de Clermont-Ferrand est à l’époque insalubre.
Les cités Michelin s’inspirent des cités ouvrières du Nord, tout en proposant des avantages très précieux pour l’époque. Chaque maison possédait sa propre salle de bain et était reliée à l’électricité. Elles étaient avant tout destinées aux familles, les célibataires étant hébergés plus dans des immeubles à part. Ces nombreux privilèges permettaient ainsi de fidéliser les salariés.
La croissance de Michelin ralentit dans les années 30. Elle s’arrête complètement pendant la seconde guerre mondiale, tout comme la construction des cités Michelin.
A partir de 1950 : changement de modèle et adaptation
A partir des années 50, les constructions se modernisent et on change de modèle d’habitation. Les toits sont plats et en métal. Chaque maison dispose désormais d’un garage, en plus d’un jardin potager. On soigne les entrées qui sont arborées.
A noter tout de même, la faible place des aménagements collectifs dans ces cités. On ne retrouve pas de place, de parc, ou bar. Rien qui facilite le regroupement des ouvriers des Michelin. chacun chez soi. Pas de jardin d’ornement non plus. Une clause dans le contrat de location stipule que le jardin doit être productif.
Michelin continue de proposer des conditions très favorables à ses ouvriers : écoles, piscine, colonies de vacances et cimetières, tout est estampillé Michelin.
A partir des années 70, on retourne sur des logements collectifs, familles comme célibataire. Des locations courte-durée sont proposées pour les salariés qui ne viennent que quelques mois. En effet, le développement de Michelin vide la Limagne de ses agriculteurs. Ils sont de plus en plus nombreux à avoir une double activité. Paysans et ouvriers, pendant les périodes plus calmes.
Quel avenir pour les cités Michelin ?
Au fil des années, les cités Michelin ont accueilli des profils de plus en plus variés. Aujourd’hui très prisées, pour leurs espaces extérieurs, elles font l’objet de nombreuses demandes d’extension et d’agrandissement, qui dénaturent parfois l’architecture typique de ces constructions.
Aujourd’hui plus que jamais, la question de l’importance de préserver ces trésors historiques et de leur utilisation future se pose. Quelle place pour ces cités dans l’avenir de la ville de demain qui se dessine.