Dans le process de création et de développement des entreprises innovantes, il est un sujet épineux: celui de l’industrialisation. C’était l’objet de la rencontre organisée à Hall32. C’est Anna Trzeciakiewicz, start up manager Sciences de la Vie et de la Santé au sein de Busi by Clermont Auvergne Innovation, qui nous sert de guide.
L’industrialisation, sujet central et complexe
Anna Trzeciakiewicz
L’objectif de cette journée était de présenter la vision des entrepreneurs sur le prototypage et la façon d’aborder l’industrialisation.
Finalement, la réponse est simple à formuler : il faut y penser dès la conception. C’est plus compliqué à mettre en oeuvre.
Il y a de nombreux paramètres à prendre en compte. Il faut appréhender tous les enjeux simultanément. Le contexte réglementaire et son évolution possible. Sécuriser la propriété intellectuelle. Intégrer en permance les besoins clients. Penser éco-conception, durabilité et réparabilité. Et bien sûr, financements, modèles économiques…
En bref, il faut tout prendre en compte dès la conception si on n’aborde ce sujet qu’au moment où l’on souhaite industrialiser, c’est souvent trop tard.
Industrialiser : un choix stratégique
Anna Trzeciakiewicz
En accompagnant les entrepreneurs, j’ai constaté que qu’il y avait une vraie valeur ajoutée à être entouré et à accéder à des appuis tels que ceux apportés par Hall 32: certaines très belles idées développées seul dans son garage ne passent pas ce cap. Ils ont de beaux prototypes, mais après, pour passer du prototype au produit industriel, c’est une autre affaire.
En résumé, pour industrialiser une production, il y a trois modèles possibles, avec chacun des impacts sur la stratégie de l’entreprise très différents. Le produit est industrialisé soit via un partenaire industriel, soit par un sous-traitant, soit au travers d’un investissement pour maîtriser la production. On peut aussi imaginer une quatrième voie, l’hybridation de solutions.
Le partenariat industriel, assorti d’une participation au capital permet de prendre appui sur une expertise solide. Il soulève aussi des questions d’indépendance, de poids dans les décisions de priorisation de production ou encore d’autonomie stratégique. La sous-traitance, plus souple, peut créer des dépendances et faire courrir un risque en terme de propriété intellectuelle. Enfin, la conception d’un site industriel propre qui rend possible la maîtrise de son produit, demandera des capacités d’investissements plus conséquentes, nécessitant de renforcer ses fonds propres. Pour Benjamin Dupas, de Wallace Technologies, une solution est l’hybridation: sous-traiter des pièces standard et produire en interne les pièces à valeur ajoutée pour en conserver l’expertise et la maitrise.
Deux exemples de projets en phase de prototypage / préindustrialisation
Step by step
Les témoignages convergent: la phase de conception technique, intégrant les enjeux de passage à une phase industrielle, est, par nature, coûteuse et chronophage. C’est le moment de mobiliser son réseau, et d’actionner toutes les ressources de l’écosystème, notamment les incubateurs et pôle de compétitivité. C’est le moment des essais-erreurs, des réajustements, des remises en question. Autant ne pas être seul pour la vivre !
Le résumé visuel des moments clés avec la facilitation
Anna Trzeciakiewicz
J’aimerais aussi décliner cette réflexion avec les problématiques des entreprises de biotechnologies. Et aussi montrer quelle est la problématique des entreprises santé, par exemple, qui font de nouveaux médicaments, des dispositifs médicaux… C’est très complexe. Quand on a rien à montrer, c’est un peu abstrait pour le public.
Justement, quand on parle industrialisation et biotechnologies, on peut penser au Centre d’Excellence des matériaux durables, qui émerge au sein de Cataroux. Il se positionne sur la pré industrialisation. Quelles complémentarités ?
Anna Trzeciakiewicz
En fait, il y a plusieurs étapes : le prototype quasi unique du produit, la pré-industrialisation et enfin l’industrialisation. Pour l’étape du prototypage, nous pouvons nous appuyer sur Hall 32, qui va étudier la problématique de l’entrepreneur et l’accompagner sur les aspects techniques.
Il y a aussi les plateformes technologiques de l’Université, mobilisables sur des sujets pointus comme les verrous technologiques et scientifiques. L’étape intermédiaire de pré-industrialisation, c’est un petit lot, une ultime étape avant de lancer en masse. Elle peut permettre d’identifier encore des besoins d’ajustements. Le CMD est donc une option complémentaire dans la chaine de valeur pour les biomatériaux biosourcés en particulier.
D’autres ‘pain points’ ?
Clermont Auvergne Innovation accompagne le développement des innovations à composantes technique, scientifique et technologique dans les domaines des Sciences de la Vie, Sciences pour l’Ingénieur, Technologies de l’Information et de la Communication et Sciences Humaines. L’accompagnement s’adapte à différents stades : de la maturation d’une idée issue d’un laboratoire de recherche jusqu’à l’accélération. Les start up managers ont une culture scientifique « de base », plutôt dans l’une ou l’autre des disciplines, mais ont ensuite une approche transversale sur tous les sujets de l’entreprise. Ils abordent les questions de propriété intellectuelle, réglementaires, de stratégie d’entreprise, de business plan, de financement.
D’ailleurs, dans un objectif d’acculturation de futurs ou jeunes entrepreneurs, Clermont Auvergne Innovation a déployé la Deep Tech Academy. Un ‘centre de ressources’ proposant en mode ‘auto formation’ des modules sur tous ces sujets.
Voir notre reportage ‘Mojo K7’
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