Brigitte Nivet est enseignante-chercheuse en Management et Gestion des Ressources Humaines à l’ESC Clermont. Elle participera aux tables rondes et aux ateliers de la journée Living Orgs Day, le 14 juin prochain à Epicentre, sur l’innovation organisationnelle. Une thématique qu’elle étudie au quotidien et qu’elle détaillera par des exemples concrets et des bonnes pratiques lors de cette journée spéciale.
Comment définiriez-vous la thématique de « l’innovation organisationnelle » ?
Les propositions d’innovations managériale et organisationnelle émergent comme alternatives à l’organisation taylorienne et fordiste, mais aussi à la logique de coordination centralisée bureaucratique. Ces approches classiques ne semblent plus être en mesure de répondre aux évolutions technologiques, chocs économiques, aspirations sociétales et transformations géopolitiques auxquels sont confrontés les organisations contemporaines.
Au cours des années 2000, apparaissent une réalité de souffrance au travail et une montée d’un « mal être » conduisant à un désengagement des salariés au sein des organisations. Des pratiques managériales sont alors expérimentées comme alternatives dans ces structures, fondées sur l’autonomie, la responsabilisation, la participation … Même si elles ne sont pas totalement inédites pour les observateurs des discours managériaux, elles sont présentées comme des innovations d’un management dit « humaniste ».
Est-ce une pratique de plus en plus répandue ?
Il est difficile de l’apprécier car de nombreux discours entourent ce phénomène et font l’objet d’un engouement médiatique qui relaie le storytelling de quelques dirigeants charismatiques. Il y a cependant un mouvement en cours, des expérimentations menées dans des organisations et des premiers travaux d’observation de la part d’équipes de chercheurs.
Il se passe néanmoins quelque chose … reste à préciser quoi au-delà des discours. C’est ce que s’efforcent de révéler plusieurs équipes de recherche actuellement en observation au sein d’organisations en transformation. Il y a une tendance de fond, véritable demande sociétale pour une innovation managériale qui libère l’enthousiasme et mène vers l’épanouissement.
Voyez-vous ces pratiques appliquées en Auvergne ?
Oui. Et notre équipe de recherche P.E.O.P.L.E. du Groupe ESC Clermont est engagée dans deux projets : l’un concernant une grande entreprise orientée vers la responsabilisation des équipes et l’autre à propos de 9 PME impulsant un changement organisationnel et managérial.
L’Auvergne est un territoire plutôt dynamique autour de ces questions d’innovations organisationnelles et managériales.
Les événements de type Living Orgs Day vous semblent-ils importants pour échanger sur ces pratiques ?
Bien sûr: tous les lieux et espaces favorisant des échanges entre entrepreneurs, managers, chercheurs, syndicalistes, étudiants, grand public et autres acteurs institutionnels et économiques sont de très bonnes initiatives permettant de mieux cerner ce qui est en train de se jouer dans ces expérimentations.
Un atelier participatif lors du Living Orgs Day 2016
Enfin, pour un manager « nouveau » sur ce thème, quelle est la meilleure manière de procéder ?
Ce manager ne pourra réussir que si son entreprise est engagée avec tous les acteurs dans ce processus de changement… S’il est le leader, c’est à lui que revient la responsabilité d’impulser le projet en l’accompagnant et en étant exemplaire. Pour cela il convient :
- d’écouter les salariés ;
- d’affirmer et de faire respecter le principe d’équité;
- de former les managers à ce management humaniste ;
- de transformer les pratiques à partir de chantiers innovants (par exemple, des cercles dédiés, la conduite de réunions agiles, des évaluations spécifiques, des concours d’innovations…)
Il y a plusieurs chemins possibles, chaque entreprise doit trouver le sien.
