A Aurillac, aux Marmiers les citoyens s’engagent dans les quartiers

A Aurillac, aux Marmiers les citoyens s’engagent dans les quartiers

Les conseils citoyens dans les quartiers prioritaires existent depuis près d’une décennie. Ils sont censés être associés aux projets de renouvellement urbain. Celui des Marmiers est hébergé au Centre social du quartier. Rencontre avec Julien Alejo, le médiateur de cette association pas comme les autres.

Vous allez nous expliquer votre rôle de médiateur dans le quartier des Marmiers à Aurillac. D’abord, parlez-nous un peu de votre parcours.

Je suis né à Thiers et je suis arrivé dans le Cantal à 6 ans. Après mon lycée, je suis reparti du côté de Clermont-Ferrand pour mes études supérieures.

 J’ai eu un parcours professionnel assez atypique et divers. J’ai travaillé dans l’entreprise que mes parents avaient fondée, avant de faire un passage par le secteur bancaire pour ensuite devenir médiateur numérique pour La Poste. Depuis septembre 2021, je suis médiateur en faveur de la participation des habitants du centre social de Marmiers à Aurillac.

Ce centre social a une longue histoire qui remonte à 1976…

Le centre social a été ouvert à la fin des années 70, suite à l’extension de l’habitat de la ville d’Aurillac vers le Sud. Il avait pour objectif de “trouver des solutions à des problèmes sociaux”. Aujourd’hui, le centre propose des services de garde d’enfants, des activités périscolaires ou pendant les vacances et un accompagnement au devoir.

Il existe un club ados de 12 à 18 ans qui fonctionne très bien. D’ailleurs, cet été, en contrepartie d’un séjour, ce groupe de jeunes va participer à des activités citoyennes notamment pour la remise en état de certaines installations des jardins partagés. D’une manière générale, on propose aux jeunes un accompagnement pédagogique à la citoyenneté 

Quel est votre rôle au sein de centre social ?

Pour le secteur des adultes, des bénévoles proposent des ateliers. Mon rôle est d’aller chercher des publics qui ne viennent pas naturellement, celles et ceux que l’on nomme parfois les invisibles. Ce sont des publics en grande précarité,  des personnes âgées et/ou isolées.

Par ailleurs, le centre social est la structure porteuse du conseil citoyen. D’un point de vue légal, dans tous les quartiers prioritaires, il y a une obligation de constituer un conseil citoyen. Nous sommes les seuls dans le Cantal à avoir monté ce conseil citoyen en association. Nous sommes complètement indépendants de la collectivité.

A quoi sert un conseil citoyen pour le quartier des Marmiers à Aurillac ?

Le conseil citoyen est composé uniquement de citoyens. Il n’y a pas d’élus ou de représentants d’organismes publics. Le conseil citoyen, légalement, doit être intégré dans les copil et le comité technique du contrat de ville.

Ce contrat de ville, c’est la mise en oeuvre opérationnelle du NPNRU initié en 2014. Le Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain, “prévoit la transformation de plus de 450 quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il interveient fortement sur l’habitat et les équipements publics, pour favoriser la mixité dans ces territoires.”

Lorsque ces différentes instances se réunissent pour faire le suivi du plan, il y a une obligation de présence de membres du conseil citoyen. Ils peuvent donner leur avis et faire remonter les interrogations ou les remarques des habitants. Ce sont les porte-parole des habitants du quartier.

Le conseil citoyen doit être intégré à la mise en place des projets. Il peut être consulté, mais il n’y a pas d’obligation légale de prise en compte de leurs contributions dans la décision finale.

Quand il n’y a pas de contraintes, est-ce que la relation citoyen-parties prenantes fonctionne ?

Je ne peux parler que pour notre conseil citoyen, mais oui en effet, la relation fonctionne. Ils ont rencontré la présidente de Cantal Habitat pour parler des travaux de rénovation. Suite à cet échange, Cantal Habitat a mis en place une permanence pour le suivi des travaux à la demande du Conseil Citoyen.

L’objectif n’est pas de critiquer les décisions prises, mais d’apporter des améliorations et de travailler en cohésion avec les instances. Le Conseil Citoyen ne doit pas être l’intermédiaire pour faire remonter des demandes individuelles, il est là pour le collectif, pour l’intérêt général de toutes et tous.

Pour les projets qui sont actuellement mis en œuvre, le conseil citoyen agit comme un expert d’usages. Par exemple, une aire de jeux est en construction, les membres ont fait valoir l’importance d’ajouter des bancs, des poubelles et un point d’eau. On est sur quelque chose de concret. C’est une relation gagnant-gagnant. On a tout intérêt à répondre aux besoins spécifiques pour assurer une utilisation optimale de ces nouveaux équipements.

Qui compose ce conseil citoyen des Marmiers à Aurillac ? ? 

Il est composé d’une quinzaine de personnes : 4 associations et 11 habitants. Ce sont des personnes volontaires et engagées. Elles donnent beaucoup de leur temps pour l’intérêt de tous. 

Il faut compter 2 heures de réunion mensuelles, et également tout le temps nécessaire à la préparation d’événements pour faire vivre le quartier et renforcer le lien social entre les habitants. Par exemple, on a comptabilisé 70 heures de réunion de travail depuis le début de l’année 2022.

Quels sont les enjeux pour les quartiers prioritaires ?

Au centre social de Marmiers, il y a un gros effort qui est fait autour de la cohésion sociale pour impliquer les citoyens et les associations. Les deux ans de covid ont mis les gens “en veille”. Il y a moins de circulation d’informations, d’où la volonté de relancer le dialogue.

Il faut reconnaître que les instances publiques répondent plutôt favorablement aux demandes du conseil citoyen. Néanmoins, il y a des limites à la participation citoyenne. Les citoyens n’ont pas forcément les connaissances techniques sur la faisabilité d’une demande des habitants. C’est pour cela que le dialogue est nécessaire, pour expliquer ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. 

On entend souvent le terme “médiateur”, comment est-ce que vous accompagnez ce groupe de volontaires ? 

Quand je suis arrivé, j’ai pris le temps d’analyser les forces et faiblesse du groupe. Comme j’ai eu un parcours professionnel atypique, je peux leur partager mon expérience et apporter des réponses à certaines de leurs questions. Mon rôle, si je ne peux pas répondre à leur question, c’est de leur permettre d’avoir accès à la bonne information.

D’ailleurs, il existe au niveau national une formation de l’École du Renouvellement Urbain spécifiquement destinée aux membres du conseil citoyen. Elle permet à ceux qui le souhaitent de se former pour mieux comprendre leur rôle au sein du conseil. 

Est-ce que ces conseils ont vocation à perdurer et à évoluer dans le temps ? 

Les conseils citoyens sont liés au contrat de ville. Ils disparaîtront une fois le projet de renouvellement urbain achevé. Par exemple, il va y avoir une renégociation en 2023. 

Il y a eu une demande de la part des membres du conseil d’être formés pour monter en compétences sur certains sujets. Par exemple, ils ont bénéficié d’une formation aux premiers secours. Prochainement, nous allons mettre place une formation autour de l’égalité femme-homme en partenariat avec le CIDFF. 

Nous n’avons pas un programme pré-établi. En fonction des demandes, nous nous adaptons. La seule obligation, c’est que nos actions soient en faveur de l’intérêt général et qu’elles aient des répercussions positives et pérennes.

Nous cherchons à apporter des solutions citoyennes aux problèmes des habitants. En ce moment, nous organisons des séances de brainstorming sur les sujets de mobilités. Comment faire pour que les personnes sans moyen de locomotion puissent se rendre à leurs rendez-vous médicaux par exemple ?

À propos de Pauline Rivière

Pauline Rivière est journaliste et rédactrice en chef du média en ligne le Connecteur. Elle est en charge du choix des dossiers spéciaux mensuels. Elle développe également des outils de datavisualisation à destination de l'écosystème de l'innovation et s'intéresse à l'innovation éditoriale. Avec sa société SmartVideo Academy, elle anime différentes formations à la réalisation de vidéos (au smartphone notamment) et à l’écriture audiovisuelle. Elle intervient également dans l'Enseignement Supérieur dans le cadre de projets pédagogiques digitaux, mêlant techniques de communication et sujets d'innovation.