Le Centre des Matériaux Durables : Un écosystème unique en Europe

Le Centre des Matériaux Durables : Un écosystème unique en Europe

Un centre d’innovation stratégique pour la transition écologique

Au coeur de Clermont-Ferrand, dans la zone de Cataroux, se trouve un centre dont l’ambition, d’après son directeur, est de révolutionner l’industrie des matériaux : le Centre des Matériaux Durables (CMD). Pierre Robert, directeur du CMD, le décrit comme « un écosystème unique en Europe », conçu pour accompagner des innovations décisives dans le cadre de la transition écologique. 

Le CMD est au cœur de la stratégie de développement industriel de l’ex Région Auvergne. L’écosystème repose sur une infrastructure complète, allant des laboratoires de recherche jusqu’aux démonstrateurs industriels, permettant de valider les nouvelles technologies avant leur passage à l’échelle industrielle. « Finalement, ce qu’on fait ici, c’est de mettre en place un accélérateur d’innovation pour l’écologie », explique Pierre Robert. Avec des domaines de spécialisation comme le recyclage mécanique, le recyclage chimique et les matériaux biosourcés, le CMD se positionne à la croisée des chemins entre durabilité et industrie.

Un pôle d’excellence dans le recyclage mécanique et chimique

L’une des priorités du CMD est d’apporter des solutions à l’enjeu colossal du recyclage. Aujourd’hui, une part infime des matériaux plastiques utilisés est effectivement recyclée. Cette réalité, Pierre Robert la connaît bien : « C’est un enjeu extrêmement fort, et qui aura besoin de toutes ces nouvelles technologies. »

Pour répondre à cette problématique, le CMD s’attaque à deux axes principaux : le recyclage mécanique et le recyclage chimique. « Le recyclage mécanique, c’est un domaine extrêmement important. Un bon exemple, c’est l’entreprise Capillum, qui fait du recyclage mécanique de cheveux pour faire des nouveaux matériaux », précise Pierre Robert. Ce type de recyclage permet de revaloriser des matières premières en les transformant directement, sans les altérer chimiquement.

Mais le CMD ne s’arrête pas là. Avec des acteurs comme Carbios, pionnier du recyclage chimique des polymères, et BOBINE, spécialisé dans le recyclage chimique des polyoléfines, le CMD explore de nouvelles pistes prometteuses. «Ces innovations permettent de décomposer les matériaux en leurs composants moléculaires pour les réutiliser, ce qui ouvre des perspectives immenses pour l’industrie», souligne Pierre Robert.

Les matériaux biosourcés : une réponse aux défis environnementaux

Au-delà du recyclage, un autre axe clé du CMD est le développement des matériaux biosourcés, une alternative durable aux matériaux d’origine fossile. Ces matériaux, issus de sources renouvelables comme les plantes ou les déchets organiques, offrent des solutions écologiques pour répondre à la demande croissante en matériaux tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre.

« Nous avons ici ResiCare, qui est un leader dans le domaine des colles biosourcées », explique Pierre Robert. L’objectif est de proposer des alternatives aux matériaux traditionnels en utilisant des ressources naturelles, moins polluantes et plus facilement recyclables. Le CMD travaille également sur la création d’une Biotech Open Platform, un espace destiné à la recherche et au développement de ces nouveaux matériaux. « Nous sommes en train de créer cette plateforme biotech, qu’on appelle la Biotech Open Platform. »

La Biotech Open Platform : un projet à rayonnement mondial

L’ambition internationale du CMD se concrétise également à travers des collaborations avec des entreprises de renommée mondiale. C’est le cas de DMC Biotech, une start-up américaine spécialisée dans les biotechnologies, qui a choisi de s’implanter à Clermont-Ferrand. « Le patron de l’entreprise DMC Biotech, qui est quand même venu du Colorado, m’a dit : «C’est celui-là que je veux», se souvient Pierre Robert, en parlant des infrastructures du CMD.

Cette Biotech Open Platform va permettre à des start-ups et entreprises innovantes de monter en échelle leurs procédés et de passer du laboratoire à la production industrielle. L’objectif est de créer une dynamique d’innovation partagée, où les infrastructures seront mises à disposition des acteurs du secteur. « Le principe, c’est d’installer ici des infrastructures qui vont prester pour des entreprises. Les fondateurs vont les utiliser, mais également des start-ups, des entreprises qui ont besoin de monter à l’échelle leurs procédés », détaille Pierre Robert. Ce projet d’envergure internationale permet à Clermont-Ferrand de rayonner bien au-delà des frontières françaises, attirant ainsi des talents et des investisseurs du monde entier.

Un modèle réplicable dans d’autres régions industrielles ?

Avec cette ouverture, la question se pose : le modèle du CMD pourrait-il être dupliqué dans d’autres régions industrielles en France ou ailleurs ? « L’offre que nous développons aujourd’hui dans ce domaine est relativement unique », estime Pierre Robert. Toutefois, le groupe Michelin, partenaire stratégique du CMD, a déjà développé des projets similaires dans d’autres régions du monde, notamment en Caroline du Sud et en Chine. « Michelin a ce type d’activité et ce type de projet ailleurs sur la planète, dans des sites industriels, que ce soit en Caroline du Sud ou en Chine. »

Pierre Robert reste cependant prudent sur cette question, soulignant que chaque écosystème industriel a ses spécificités et qu’il est important d’adapter ces projets à chaque contexte local. « Ce genre de projet doit être en phase avec les besoins industriels et les opportunités de chaque territoire », ajoute-t-il.

Une attractivité qui dépasse les frontières de l’Auvergne

Au-delà du côté unique du projet, le CMD et l’ensemble du site de Cataroux souhaite positionner Clermont-Ferrand comme un hub d’innovation. D’ailleurs, l’écosystème industriel se renforce avec des initiatives comme le PIC (un espace de coworking et de co-living) et la Manufacture des Talents, un centre de formation dédié à la montée en compétence des professionnels locaux. « Le PIC, est une offre qui est complètement en synergie avec ce qu’on fait sur le CMD », explique Pierre Robert.

« On peut vraiment avoir une offre réellement différenciante, et c’est bien au-delà des frontières de l’Auvergne, voire de la France », conclut Pierre Robert.

Le Centre des Matériaux Durables incarne la manière dont des acteurs industriels historiques s’efforcent de se réinventer face aux défis écologiques et économiques du XXIe siècle. Pour rappel, Michelin s’est fixé un objectif ambitieux : d’ici 2050, l’intégralité de ses pneus seront fabriqués à partir de matériaux 100 % durables, avec une amélioration de l’efficacité énergétique de 10 % dès 2030 par rapport à 2020. Ce type d’ambition, soutenu par des infrastructures pionnières comme le CMD, est essentiel non seulement pour répondre aux impératifs de durabilité, mais aussi pour garantir la compétitivité et la pérennité des entreprises dans un environnement industriel en pleine mutation.

À propos de Pauline Rivière

Pauline Rivière est journaliste et rédactrice en chef du média en ligne le Connecteur. Elle est en charge du choix des dossiers spéciaux mensuels. Elle développe également des outils de datavisualisation à destination de l'écosystème de l'innovation et s'intéresse à l'innovation éditoriale. Avec sa société SmartVideo Academy, elle anime différentes formations à la réalisation de vidéos (au smartphone notamment) et à l’écriture audiovisuelle. Elle intervient également dans l'Enseignement Supérieur dans le cadre de projets pédagogiques digitaux, mêlant techniques de communication et sujets d'innovation.