Collégiens d’Auvergne : à quoi ressemblerait la métropole de demain si c’était eux les décideurs ?

Collégiens d’Auvergne : à quoi ressemblerait la métropole de demain si c’était eux les décideurs ?

Et si on confiait aux collégiens les clés du futur de leur territoire ? C’est l’expérience proposée aux collégiens d’Auvergne lors d’un atelier conçu par Le Connecteur, dans le cadre du séminaire Urban Energy Pact. L’événement, organisé par Clermont Auvergne Métropole et Astusciences pendant la Clermont Innovation Week, a réuni cinq établissements scolaires de la métropole.

Des ateliers ancrés dans l’innovation et l’expertise locale

L’après-midi a été rythmé par une série d’ateliers animés par des partenaires engagés sur les grands enjeux de transition. GRDF et le service de gestion des déchets de la Métropole ont présenté le principe de la méthanisation. EDF a proposé une lecture des enjeux énergétiques actuels. Ici Auvergne a fait réfléchir les élèves à la manière dont les médias traitent l’écologie. Vulcania et le service de traitement des eaux ont parlé sensibilisation scientifique.

Arnaud Diemer a illustré ce qu’est un projet de développement durable territorial, à travers trois cas concrets : le recyclage du PET dans les pneumatiques, la production d’énergie locale et la création de réseaux de chaleur. Enfin, Ben Viera Kouassi a apporté un éclairage sur les mécanismes économiques et diplomatiques derrière les traités environnementaux.

Un jeu « tu as toutes les cartes en main »

Les collégiens ont ensuite découvert un jeu de cartes imaginé par Le Connecteur, présentant quinze initiatives locales de transition écologique. Chaque carte racontait un projet déjà existant dans la métropole : ferme urbaine, panneaux solaires, bus à hydrogène, recyclage des cheveux ou réouverture de la rivière Tiretaine.

En fin de journée, place au vote. Chaque collégien, muni de trois gommettes représentant trois millions d’euros fictifs, devait répondre à une question simple et sérieuse : « Vous êtes président de la métropole. Sur quoi investiriez-vous pour l’avenir ? » Derrière leurs choix, c’est toute une vision du monde qui s’est dessinée.

Premier choix massif : la rivière Tiretaine réouverte

C’est la carte qui a le plus mobilisé, tous établissements confondus : “Une rivière à Clermont-Ferrand” a recueilli 39 millions d’euros symboliques. Le projet de remettre à ciel ouvert un tronçon de la Tiretaine dans un nouveau parc urbain a visiblement frappé l’imaginaire des élèves. On y retrouve l’idée d’un retour à la nature, d’un espace partagé et visible. Un marqueur fort d’un désir de ville plus respirable, plus vivante, plus proche de l’eau et du vivant.

Deuxième place : l’éducation à l’environnement

Autre carte plébiscitée : “Sensibiliser à l’école, au collège et au lycée” (30 millions). Les collégiens d’Auvergne ont donc choisi… de se former eux-mêmes. Ou en tout cas de faire de la sensibilisation un levier clé de transformation. Cette carte renvoie à la force des récits, des petits gestes qui déclenchent des prises de conscience. Et peut-être aussi à un besoin de se sentir acteur d’un changement global.

Nature, air pur et imagination verte

En troisième place : “Plus de nature en ville” (23 millions). Et un peu plus loin, “L’hydrogène pour les bus” (20 millions) ou encore “Des pneus recyclés d’ici 2050” (19 millions). Ces choix racontent une attention forte portée à la qualité de l’air, à la mobilité, à la capacité d’innover sans détruire. On retrouve l’envie d’un quotidien plus sain et d’un futur maîtrisé.

Des établissements, des sensibilités

Le détail par établissement révèle des nuances intéressantes. Par exemple :

  • Le collège Albert Camus a massivement investi dans la Tiretaine (21 millions) mais aussi dans les innovations locales et le recyclage des pneus Michelin.
  • Le lycée de Gergovie s’est distingué en mettant 28 millions sur l’éducation à l’écologie, presque à lui seul.
  • Le lycée Lafayette a équilibré entre végétalisation urbaine, mobilité décarbonée et matériaux réemployés.
  • Le collège de Ceyrat a exprimé une préférence pour des actions locales et visibles, comme les arbres, le gaz vert, ou encore le projet InspiRe.
  • Le lycée Jeanne d’Arc s’est montré plus partagé, mais a valorisé l’énergie solaire et la ceinture verte alimentaire.

Des imaginaires ancrés et lucides

Ce jeu, au-delà des chiffres, révèle une tendance : l’attachement à ce qui est concret, local et transformable. Les élèves votent peu pour les grandes politiques internationales (seulement 1 vote pour les traités climatiques), mais plébiscitent les solutions qu’ils peuvent voir, toucher ou dans lesquelles ils peuvent s’impliquer.

Trois grands imaginaires émergent :

  • La ville régénérée : verte, aérée, reconnectée à la nature (arbres, rivière, compost).
  • La transition douce mais active : on ne renverse pas tout, mais on change à travers l’école, l’innovation locale, le recyclage intelligent.
  • L’action à hauteur d’humain : ce qui compte, ce sont les projets concrets, proches, racontables. Ceux qui donnent envie de croire que la transition est déjà là.

Un avenir à construire .. avec eux 

Ce test grandeur nature montre à quel point les collégiens et les jeunes peuvent s’emparer de sujets complexes quand on leur donne les bons outils. Loin d’être déconnectés, ils formulent des choix clairs, ancrés dans le réel et porteurs de sens. Ce jeu n’était qu’un point de départ. Il pourrait demain devenir un véritable outil d’exploration des transitions industrielles et écologiques, adapté à d’autres territoires et enrichi par de nouveaux récits. Parce qu’au fond, construire l’avenir, ça commence peut-être par écouter celles et ceux à qui il est destiné.

Un jeu de cartes librement réutilisable… avec ou sans animation

Le jeu de cartes conçu pour cet atelier avec les collégiens Auvergne est mis à disposition gratuitement : il peut être utilisé, adapté, diffusé librement à condition de mentionner Le Connecteur, de ne pas en faire un usage commercial, et de partager les adaptations sous la même licence.

Et pour aller plus loin, Le Connecteur peut aussi intervenir auprès des élèves pour animer des temps d’échange autour de ces cartes : découverte des initiatives locales, débats sur les imaginaires de transition, compréhension des innovations technologiques… Un format simple, mobilisable dans un établissement ou dans le cadre d’un événement, pour parler écologie autrement.

Urban Energy Pact : des établissements de la métropole en mode transition

Les lycées et collèges se transforment en véritables laboratoires de la transition énergétique. Grâce au programme Urban Energy Pact, des établissements expérimentent, testent, aménagent… et s’engagent pour un avenir plus durable.

Gergovie mise sur la biodiversité et l’adaptation climatique

Au lycée Gergovie, le défi est clair : réduire les îlots de chaleur et anticiper les effets du changement climatique. Des travaux paysagers sont lancés pour réintroduire de la fraîcheur dans la cour. Des eaux usées traitées sont analysées pour envisager leur utilisation dans l’arrosage de plantes non comestibles. Une sélection de végétaux résistants au réchauffement complète l’approche. L’objectif à long terme : faire du site un modèle de territoire à énergie positive.

Albert Camus repense son architecture scolaire

Au collège Albert Camus, on repart des bases. L’établissement a lancé un diagnostic énergétique complet, avec le soutien de l’entreprise CIDECO et du Conseil départemental. À la clé : un plan d’action pour débitumer la cour, créer des zones d’ombre, améliorer l’isolation des bâtiments. Un auvent connecté, capable de relever des données météo en temps réel, sert de support scientifique. Des maquettes de solutions techniques seront présentées lors d’Exposciences, en attendant la mise en œuvre concrète des premières préconisations.

Jeanne d’Arc fait la chasse au gaspillage et protège les oiseaux

Au collège Jeanne d’Arc, ce sont les éco-délégués qui sont aux manettes. Leur mission : lutter contre le gaspillage alimentaire à la cantine, via des campagnes de sensibilisation et des pesées correctives. Mais l’action va plus loin. L’établissement a rejoint le réseau des refuges LPO (Ligue de Protection des Oiseaux). Des nichoirs ont été construits en bois recyclé, en partenariat avec des bénévoles et des techniciens. Et pour compléter le tout : tri sélectif, récup’ de piles et de livres, brocante… chaque geste compte.

Henri Pourrat modélise pour mieux transformer

Au collège Henri Pourrat de Ceyrat, l’approche passe par la modélisation à l’échelle. Les élèves ont réalisé une maquette au 1/100 de leur établissement afin d’identifier les postes énergivores et de réfléchir à des solutions concrètes de réduction de consommation. Une manière simple et pédagogique de rendre visibles les leviers de transformation.

À propos de Pauline Rivière

Pauline Rivière est journaliste et rédactrice en chef du média en ligne le Connecteur. Elle est en charge du choix des dossiers spéciaux mensuels. Elle développe également des outils de datavisualisation à destination de l'écosystème de l'innovation et s'intéresse à l'innovation éditoriale. Avec sa société SmartVideo Academy, elle anime différentes formations à la réalisation de vidéos (au smartphone notamment) et à l’écriture audiovisuelle. Elle intervient également dans l'Enseignement Supérieur dans le cadre de projets pédagogiques digitaux, mêlant techniques de communication et sujets d'innovation.