Par Damien Caillard
Le 4 mai 2017, l’ESC Clermont a vécu une grande expérience: une conférence TEDx a eu lieu dans ses locaux. Plus précisément, le premier TEDxESCClermont, 7 speakers, 10 partenaires, une centaine de spectateurs … Comme pour les milliers de conférences TEDx qui ont lieu chaque année dans le monde, les intervenants se sont exprimés sur la scène de l’auditorium Genova, pendant environ un quart d’heure, autour de la thématique « Demain(s) »: des utopies aux fablabs, du voyage autour du monde à la composition interne de Mars. Tous les sujets sont traités pour être accessibles à tous, et mettent l’accent sur une notion clé à retenir – très souvent un point de vue original porté par le speaker. Mais ce nouvel événement sur la scène clermontoise possède un atout fort: c’est un des rares TEDx français à être complètement intégrés dans un programme pédagogique.
Au début était la licence
Le TEDxESCClermont est en quelque sorte le petit frère du TEDxClermont, qui a déjà lieu depuis plusieurs années. Déclinaison locale des grandes conférences TED nées à Monterey (Californie), les TEDx sont tous localisés et font l’objet d’une licence, gratuite mais exigeante, attribuée annuellement à une personne précise. A Clermont, c’est Lionel Faucher qui porte depuis plusieurs années cette licence pour le TEDxClermont. Et qui a accompagné l’ESC quand celle-ci a eu l’idée d’organiser sa propre conférence.
Cependant, assez vite s’est imposée une licence particulière, le « TEDx Universités » qui est attribué à des structures dédiées à l’enseignement. « La licence universitaire était évidente » se souvient Lionel Faucher. « et je pouvais aider le projet avec plaisir, d’autant plus que l’ESC est partenaire du TEDxClermont. ». A l’école de commerce, c’est Valme Blanco, directrice du programme Grande Ecole, qui a porté la licence. « C’est une grande responsabilité ! » confie-t-elle. « Le porteur de la licence doit montrer qu’il a compris l’essence de TED. [Pour l’obtenir,] on nous pose des questions personnelles, sur nos valeurs, nos croyances. (…) C’est un peu comme une responsabilité éditoriale. »
Car la licence TEDx Universités reste basée sur un principe-clé: « des idées qui méritent d’être partagées », quel que soit le domaine évoqué (en excluant toutefois les argumentations politiques, le prosélytisme religieux et la pseudo-science). Une approche bien comprise par Emmanuel Bonnet, enseignant-chercheur en charge de l’accompagnement des speakers et de leurs coaches: « A partir de notre thème ‘Demain(s)’, on a essayé de décliner le principe de TEDx: des idées avant les personnes. C’est très important. » insiste-t-il. « La finalité est de changer notre regard sur [chaque] sujet. Par exemple, l’utopie, que l’on croit impossible; on va montrer qu’elle a un potentiel transformateur. C’est l’objet du talk de Nicolas Duracka. »
Une intégration complète dans le cursus de l’ESC
Beaucoup de grandes écoles et d’universités laissent fleurir les side projects étudiants en marge du programme principal. A l’ESC Clermont, c’est l’inverse qui s’est produit cette année: le TEDx a été intégré de manière structurante dans le cursus. Et c’est une grande fierté pour Françoise Roudier, directrice du groupe ESC Clermont: « TEDxESCClermont est un projet qui vise des objectifs pédagogiques précis, avec un travail réalisé sous contrôle par les étudiants, et avec des partenaires extérieurs. C’était une opportunité de traiter des thématiques d’analyse et de réflexion, tout en faisant travailler les étudiants sur un projet événementiel conventionné et à 360 degrés. »
« TEDxESCClermont est un projet qui vise des objectifs pédagogiques précis » – Françoise Roudier
Le projet TEDxESCClermont a donc entraîné la création, à la rentrée 2016, d’un nouveau module de cours: « Grand Projet Evénementiel ». Dans ce cours obligatoire de première année, les étudiants ont eu le choix entre la conférence TEDx ou l’Atelier Ephémère du Cinéma, autre projet d’envergure en lien avec le Festival du Court-Métrage. « C’est un vrai programme structurant » insiste Pascale Borel, professeur de marketing. « Il y a trois professeurs en charge sur la partie pédagogique: Valme Blanco, Emmanuel Bonnet et moi-même. » Autour de ces professeurs, les étudiants sont répartis en équipes de 6 à 7 membres: production (recherche de speakers et coaching), communication (promotion, goodies, partenariats) et organisation (logistique, accueil, suivi budgétaire).
Plusieurs autres modules de cours sont organisés pour venir en renfort de l’organisation du TEDx. Thomas Vincent, élève de 1ère année dans le groupe « communication », met en avant cette fertilisation croisée : « J’ai particulièrement aimé la polyvalence des tâches: recherche de sponsors, création graphique, communication sur les réseaux sociaux … c’est enrichissant sur les plans perso, pro, et humain, notamment dans l’interaction des trois équipes. » Par l’emploi des méthodes agiles, les étudiants ont pu s’approprier le projet et faire émerger la thématique « Demain(s) ». « Ce qui est ressorti, c’est une préoccupation pour l’avenir de la planète: (…) c’est ‘Demain(s)’ car il y a autant de demains que de personnes. » résume Valme Blanco.
Dans l’esprit d’un projet d’entreprise
Mais le grand atout d’un projet structurant comme le TEDxESCClermont, c’est qu’il fait travailler les étudiants dans le cadre d’un projet similaire à ce qu’on pourrait trouver en entreprise. D’abord parce qu’il y a un objectif précis: réussir une conférence avec 7 speakers et 100 spectateurs le 4 mai. « C’est intéressant de travailler dans une démarche contrainte » souligne Pascale Borel. « C’est la première fois que je fais un projet de cette ampleur, aussi normé » confirme Thomas Vincent. « Il faut rester dans le cadre, on n’a pas le droit à l’erreur ! » Ce cadre, c’est celui de la licence TEDx Universités, soumise à un renouvellement annuel; c’est aussi celui d’un projet d’envergure en entreprise, qui doit être structuré, qualitatif et respectueux d’un budget – même si les TEDx sont organisés bénévolement. Les étudiants de première année ont dû très vite s’approprier ces nouveaux codes.
Parmi ceux-ci, l’impératif d’efficacité pour parvenir au but poursuivi en mobilisant intelligemment les moyens disponibles. « Il fallait travailler avec les ressources de l’école, par exemple le service communication. » résume Pascale Borel. Il y a aussi l’équipe du TEDxClermont qui a accompagné le projet depuis le début, en limitant cependant son expertise aux points délicats comme le coaching: « L’idée principale est que ce soient les étudiants qui travaillent, et après on affine si besoin » pour Lionel Faucher.
« On a l’habitude de faire travailler ensemble le monde de l’entreprise et le monde académique » – Pascale Borel
Enfin, le financement était aussi au programme de ce module événementiel, par l’intermédiaire des partenaires. En tant qu’école de commerce historique de la place clermontoise, l’ESC bénéficiait déjà d’un fort réseau d’entreprises « amies » qui a d’autant mieux répondu que l’initiative était originale et structurante. « On a l’habitude de faire travailler ensemble le monde de l’entreprise et le monde académique » souligne Pascale Borel, sans oublier « un grand réseau de diplômés, qui est très présent autour de nos événements. »
Vers un second cycle TEDx à Clermont ?
Le 4 mai au soir, tout s’est bien passé. Les sept interventions se sont déroulées avec une vraie intensité, sous le regard attentif d’un public nombreux et de plusieurs caméras qui ont immortalisé l’événement. Malgré d’inévitables rushes de dernière minute, les étudiants et professeurs organisateurs étaient très satisfaits. « On était en logique d’apprentissage » concède Emmanuel Bonnet. « Notre base d’expérience, c’était les coaches du TEDxClermont [Dominique Aimon et Pierre Gérard surtout, qui] étaient présents pendant les répétitions. Ils ont eu un rôle capital: c’étaient des coaches de coaches, et le savoir a été transmis en direct pendant ces répèt’, pas en mode cours ou formation. » Jean-Baptiste Gallié, professeur et responsable de la filière Marketing Digital, a coaché Jessica Pommier, la première intervenante: « Je suis vraiment content ce soir (…) On a fait plusieurs répétitions, j’ai fait le prompteur dans les loges, mais j’avais finalement plus un rôle de miroir dans ce parcours d’accompagnement à la cohérence et à la construction. »
Et demain ? Au-delà du bouclage de cette session et du remerciement des partenaires, la « franchise » TEDx examinera les retours de l’événement et décidera de son renouvellement. Mais les participants voient déjà l’édition 2018, et notamment Thomas Vincent: « On bâtira de la fidélisation, on entretiendra cette communauté naissante autour du TEDxESC« . Ce « on » étant constitué de promos successives, puisque le TEDx restera un projet de première année. « Cette année, on est parti de zéro. Mais le prochain groupe bénéficiera de ce qu’on a fait. Il y aura une passation sur les outils, mais aussi sur l’état d’esprit » précise Thomas.
Le partenariat avec TEDxClermont devrait aussi se pérenniser, notamment par la mise en place d’un « comité éditorial » commun qui pourrait inclure des professeurs de l’ESC: « Ils peuvent aider en amont [de l’évènement], dans un comité dédié à retenir les idées. » estime Dominique Aimon, « super-coach » de la soirée. « [Ce partenariat serait] un très bon moyen de monter en compétence pour tout le monde. » complète Lionel Faucher. « Ce qu’on a mis en place cette année, c’est un coaching en commun, un partage d’expérience, pour qu’on puisse finalement coacher indifféremment des speakers TEDx ou TEDxESC. » Et les étudiants ayant participé au TEDxESC seront invités à participer au TEDxClermont 2017.
« Ce partenariat serait un très bon moyen de monter en compétence pour tout le monde. » – Lionel Faucher
Pour conclure, Françoise Roudier apporte la perspective la plus large: « C’est la thématique d’une pédagogie avec de la fertilisation croisée, incluant les professeurs, les services de l’école en support, les speakers au-delà des enseignants … on pourra rentrer dans un cycle TEDx pour pérenniser l’événement, quitte à en modifier le format.« . TEDx et Atelier Ephémère en première année, entrepreneuriat en seconde, avec des entreprises partenaires … « on est en plein dans une évolution de nos méthodes pédagogiques vers l’apprentissage par les projets et la mise en situation. » insiste Pascale Borel. « Cela ne veut pas dire supprimer les cours, mais plutôt que les étudiants ‘fassent’ pour apprendre. C’est devenu structurant pour nos programmes. » Et cela a donné un bel événement le 4 mai dernier. Comme le résume Lionel Faucher: « Ce n’est pas un exercice facile. Mais ce qui était sur scène était largement du niveau TEDx. »
L’album photo du Connecteur, avec notre partenaire Families:
Prochain TEDxClermont: le 21 octobre 2017 à l’Opéra Théâtre
Voir les vidéos des interventions au TEDxClermont 2016
Crédit photo: Damien Caillard pour le Connecteur, Valme Blanco