LUX, 2 salles, 2 ambiances pour les Industries culturelles et créatives, avec Nathalie MIEL du Damier

Nathalie Miel est directrice du Damier, le cluster des Industries Culturelles et créatives. Le Damier organisait les 23 et 24 novembre “LUX, Le nouveau salon professionnel qui met en lumière la Galaxie des Industries Culturelles et Créatives” à Clermont-Ferrand. Retour avec elle sur les intentions et le bilan, à chaud, de cette première édition.

Le cluster le Damier vient de clôturer la première édition de LUX, le salon des Industries culturelles et créatives. Pour les néophytes, est ce que tu peux rappeler ce qu’est le Damier et ce que recouvre le terme ICC ?

Un cluster, ou grappe d’entreprises en français, est un réseau d’entreprises représentatif d’une filière, qui a vocation à mettre en valeur ses adhérents et leurs activités, et à accompagner la filière dans son développement.

En l’occurrence, Le DAMIER est le cluster des Industries Culturelles et Créatives. Par ce terme, on désigne un champ assez large qui recouvre toutes les structures qui placent la créativité au cœur de leur activité. Aussi bien le spectacle vivant que l’audiovisuel, le cinéma, les studios créatifs, les arts visuels, le livre, la musique avec les labels, le booking, l’architecture, les médias, l’événementiel… 

Le DAMIER exerce des missions “classiques” de cluster. Il fédère les acteurs, met en valeur les compétences de la filière, favorise les collaborations… Ces dernières années ont été marquées par le développement conséquent du DAMIER qui se matérialise par de nouvelles missions comme l’accompagnement à la création d’entreprises dans le champ culturel et créatif, via l’incubateur HUB-IC par exemple (voir article et vidéo lors du lancement en 2020). Mais aussi, par la création de nouveaux dispositifs à destination des professionnels du secteur, notamment autour du sujet de l’accompagnement des transitions, avec par exemple la cocréation avec Les Shifters de la Fresque de la Culture ou l’accompagnement collectif de démarches RSE. 

Et, enfin, c’est le sujet aujourd’hui, il organise des salons professionnels comme le MIMA ou LUX. 

Que représente le secteur culturel et créatif sur un plan économique ?

Le Massif central compte 13 200 établissements culturels, ce qui représente 3 % de son tissu économique. 15 % des emplois relevant des activités du secteur culturel à l’échelle du Massif central se concentrent dans la métropole clermontoise.

Pour ce qui est de la métropole clermontoise : la toute récente étude de l’agence d’urbanisme fait état d’un chiffre d’affaires de 620 millions d’euros à l’échelle de la métropole de Clermont, pour un total de 6000 salariés. Cela représente tout de même 2600 établissements, soit 7% des entreprises du territoire métropolitain.

Le secteur se porte bien, il est en développement, avec une dynamique de création très importante, même si beaucoup sont de très petites entreprises, avec une prédominance du spectacle vivant. Cela correspond aussi à une appétence pour les pratiques culturelles dans notre département, largement au-dessus de la moyenne nationale.

Un mot sur Clermont 2028 ? nous aurons bientôt le verdict, si c’est positif, ça ouvre des perspectives non ?

Effectivement, ce serait l’opportunité de mettre un énorme coup de projecteur sur le secteur de la culture et plus largement des Industries Culturelles et Créatives sur notre territoire. Mais au-delà, cela devrait contribuer à structurer l’écosystème local, à multiplier les collaborations, avec cette dimension spécifique à l’échelle du Massif central porté par la candidature de Clermont. Et puis, on peut également compter sur un phénomène d’accélération, de montée en puissance du secteur des ICC, avec un enjeu de l’inscrire dans le temps.

Dans le même temps, Le DAMIER est l’un des 25 Lauréats nationaux de l’Appel à Manifestation d’Intérêt  Pôle Territoriaux ICC (France 2030). Nous portons, avec le soutien d’une douzaine de partenaires ( (Clermont Auvergne Métropole, RLV, CF28, Agence d’urbanisme, Sauve qui peut le court métrage, CCI, French tech, …), un projet de changement d’échelle ambitieux du DAMIER. Il s’agit de construire les filières culturelles et créatives de demain grâce à un pôle territorial ambitieux, responsable, innovant et résilient. Il pourrait aussi s’incarner dans un lieu dédié. Cette première victoire nous permet d’être accompagné pour structurer notre réponse territoriale à un appel à candidatures dans un an qui sélectionnera les futurs pôles territoriaux. C’est une démarche en deux temps, assez structurante.  

Lux, une brique d’un projet plus large

Lux prend tout son sens dans ce contexte; c’est une brique qui permet de diffuser les enjeux qui nous animent mais ce n’est qu’une étape: entre deux rencontres, nous  continuons à diffuser les mêmes enjeux, avec d’autres approches. Si on prend l’exemple du Parcours ‘Développement durable’, il était construit sur une base de connaissance du contexte et de la feuille de route de l’Etat, apportée par le Shift Project et le Ministère de la Culture et ensuite sur des focus sur les outils et dispositifs conçus par Le Damier pour accompagner les acteurs des ICC dans leurs transformations (accompagnement RSE, Bilan Carbone, Fresque de la Culture, …)

Notre volonté était que les participants en ressortent en étant convaincus qu’il y a des solutions accessibles pour engager leur transformation.

D’ailleurs, ‘transformer’ devient l’un des axes structurant du projet du Damier à partir de 2024, au côté de fédérer, développer, promouvoir et  innover … 

Une reconnaissance comme  Capitale Européenne 2028 pour Clermont Massif Central permettrait de donner de l’ampleur à ce projet qui s’ouvre à nous. Et si ce n’était pas le cas, notre socle demeure solide: la dynamique est lancée.

Quelle était l’ambition de LUX ?

Le Damier est organisateur d’événements depuis sa création il y a 12 ans. Jusque là, ils étaient plutôt sectoriels. Nous avions envie de mettre un coup de projecteur plus global sur la filière et pensions que nous en avions la maturité et la légitimité. 

Il y a une sorte d’alignement de planètes autour de cet enjeu de valorisation du secteur. Il y a la Stratégie Nationale d’Accélération des Industries Culturelles et Créatives dans le cadre de France 30. Elle  fait écho à la  stratégie métropolitaine sur le secteur, adoptée depuis 2018. Et enfin, à notre propre candidature comme Pôle territorial.

Donc LUX s’inscrit dans ce moment là avec plusieurs objectifs de valorisation:

  • des entreprises du secteur d’abord. Il y a de très belles boîtes et elles pourraient être mieux connues. Ce qui a conduit à la partie stands et aux interventions dans le cadre du programme “collaboration & créativité” 
  • Du Damier, à un moment de son activité où il a gagné en reconnaissance et en maturité 
  • Du territoire, avec notamment l’actualité de la candidature en tant que Capitale Européenne de la Culture

Avec LUX, planter un drapeau

L’objectif est d’installer ici, à Clermont, un événement d’envergure dédié aux ICC. BPI France organise “We are French Touch”, sur les industries culturelles et créatives, avec une définition encore plus large puisqu’elle inclut aussi le luxe, la mode, la gastronomie… Il y en a peu d’autres en France avec une approche multisectorielle. 

Nous voulions planter un drapeau pour une nouvelle biennale à Clermont. C’est chose faite !

On voit déjà ce que l’on peut faire autrement et mieux. Et même si nous n’avons pas encore diffusé l’enquête de satisfaction, nous avons déjà plein d’idées. Nous nous projetons déjà sur l’édition 2025. 

Les intervenants étaient nombreux et vraiment de qualité. Comment s’est construite sa ligne éditoriale de LUX ?

Notre programmation s’est construite sur trois objectifs. 

Prendre conscience du poids et du rôle du secteur

Le premier était de s’adresser à un public professionnel d’autres secteurs d’activités pour qu’ils prennent conscience de ce que représente ce secteur sur notre territoire. Poser de quoi on parle quand on parle ICC, ce que le secteur représente en poids économique, ses grands enjeux … Montrer aussi que ce secteur est à la croisée des chemins entre culture, économie, innovation et transformation et qu’il est contributif à plein d’autres dimensions, notamment à celle de la genèse de nouveaux récits, de nouveaux imaginaires pour transformer nos approches. Cela nous a amenés à construire un parcours qui donne envie de collaborer en faisant témoigner autour d’expériences de collaboration inspirantes. 

Questionner les grands enjeux

L’autre objectif était de questionner ce qui agite le secteur. Quels sont les grands enjeux de transformation de la filière, de ses activités, de ses façons de les mener, de ses métiers… Pour cela, nous avons conçu un programme avec des contenus à la fois d’actualité mais aussi prospectifs.  Des thèmes sur la transition numérique, sur la transition environnementale, sur la création d’entreprises culturelles et les futurs métiers. Nous avons d’ailleurs mobilisé beaucoup  d’étudiants. Cela nous paraissait vraiment très important d’associer à toutes ces réflexions les professionnels de demain. Les étudiants du Master direction de projets culturels à l’UCA, du BUT MMI du Puy, de Godefroy de Bouillon et des stagiaires du GRETA, ont répondu présents.

Nous avons effectivement mobilisé des intervenants de très haut niveau. Ils ont tous répondu favorablement à notre invitation. Nous avons envie d’y voir un signe de la crédibilité du Damier. Mais ce qui est vraiment super, c’est leurs retours après sur la qualité de l’événement. Certains ont confessé leur surprise de découvrir un tel écosystème. Ils ont noté à la fois par la qualité et la diversité de ses acteurs mais également par leur dynamique et leur état d’esprit collaboratif. 

Crédit Hmwk

Vivre la culture

Enfin, nous voulions aussi incarner la culture. Nous en avons parlé pendant 2 jours, il fallait aussi la vivre.

C’était donc l’objectif de cette soirée conçue par Biscuit Production, un adhérent du Damier. Montrer concrètement des projets de qualité issus du territoire. Au cœur du Lieu-Dit, un lieu symbolique, on pouvait découvrir des installations immersives, des créations vidéo et écouter des show cases. L’accent a aussi été mis sur la convivialité. L’Etonnant Festin s’est chargé du buffet. Et le Connecteur d’accueillir chaque nouvel arrivant avec son bureau des enregistrements !

Nous aimions beaucoup l’idée d’un événement en deux lieux. Au cœur du Centre des Congrès, le lieu sérieux où se tiennent toutes les manifestations professionnelles sérieuses. Et le Lieu-Dit, plus underground, dont les usages se conçoivent actuellement par le biais d’une programmation ouverte, non figée. Cela faisait sens par rapport au projet de la Ville sur ce lieu (lire notre article). 

Et pour nous, c’était deux salles, deux ambiances, à l’image de la place qu’occupent les ICC !

A chaud, quelle satisfaction ? Une prochaine édition ? 

Nous nous étions fixé un objectif de 600 participants pour cette première édition. Nous clôturons à 900.  C’est super. En plus, les retours sont vraiment très positifs, nous recevons plein de messages en ce sens:  c’est très agréable !

Dans nos éléments de satisfaction figure aussi la démarche de labellisation Reeves, dans laquelle nous nous sommes engagés. Elle  a été très structurante et appréciée.

Concrètement, nous sommes une “tête de réseau” et à ce titre, nous devons être exemplaires. Notre idée était d’utiliser LUX comme  un démonstrateur qu’il est possible d’organiser de beaux événements en réduisant son impact. 

Nous avions déjà lancé la machine sur le MIMA en 2022. Nous avons obtenu un label de niveau 1 (34 éco engagements). Nous avons poursuivi sur notre lancée en visant la  labellisation « événement éco-engagée de niveau 2”. Elle comporte cette fois 58 éco engagements. Ils englobent les sujets de mobilités des publics, d’alimentation et de restauration, de gestion des déchets et des ressources, de sobriété. Ainsi que la dimension sensibilisation, incluant enjeux de parité et d’inclusivité.

Le label REEVES

Quelques exemples :

– Traduction Langue des signes réalisée par l’URAPEDA en partenariat avec AUDIENS et la mission handicap.

– Restauration en partenariat avec Clermont Auvergne Event et le Six trois : proposition constituée de produits locaux, de saison, non carnés. Aucune vaisselle jetable sur l’événement.

– Déchets: collaboration avec Clermont Auvergne Métropole et l’association Terra Preta pour une prise en charge de tous les gisements créés y compris les bio déchets.

– Mobilité : compensation des émissions carbones des transports aériens pour financer un projet de sauvegarde de la faune locale avec la Ligue de Protection des oiseaux en Auvergne.

– Ressources : l’ensemble du mobilier utilisé sur l’événement, notamment dans l’espace stand est durable, produit localement et destiné à être réutilisé.

Pour terminer, c’est l’instant carte blanche ou gratitude ou les deux. Quelque chose à ajouter ?

En fait, j’ai une grande frustration ! J’aurai adoré participer à Lux en tant que visiteur. En tant qu’organisateur on est partout et donc nulle part, il y avait tellement d’intervenants que j’aurais aimé écouter..

A part ce sentiment de frustration, j’ai aussi un grand sentiment de reconnaissance.  Nous recevons des messages de remerciement et de félicitations hyper chaleureux. 

Remerciement et félicitations que j’ai envie de partager avec tous ceux qui ont contribué à ce premier LUX : les partenaires, les exposants, les intervenants, les modérateurs…
Et surtout, toute l”équipe du Damier qui s’est investie totalement dans ce projet un peu fou. 

À propos de Véronique Jal

Ma ligne guide depuis 15 ans, c'est le management de projets collectifs à fort "sens ajouté" : les fromages AOP, les hébergements touristiques, la démarche d'attractivité d'une région... et aujourd'hui l'innovation territoriale via un média associatif Toulousaine d'origine, j'ai découvert et choisi l'Auvergne que mon parcours pro m'a amenée à connaître sous plein de facettes. J'adore cette activité qui nous permet d'être en situation permanente de découverte.