La région Auvergne-Rhône-Alpes a lancé un programme d’accompagnement à la relocalisation industrielle, doté d’un budget de 1,2 milliards d’euros. Cette initiative vise à attirer les entreprises désireuses de renforcer leur ancrage territorial et de participer au développement économique local. Il ambitionne de revitaliser le tissu industriel local et de promouvoir une croissance durable. Découvrez quel est l’impact de cette stratégie d’investissement au niveau régional.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
Ludivine Giral : J’ai fait une scolarité classique à Clermont-Ferrand, en passant par une prépa HEC à Saint-Alyre. Ensuite, j’ai intégré l’IUP à Clermont-Ferrand, où je me suis spécialisée dans le management, les finances et le droit publics. J’ai poursuivi avec un DESS en droit, économie et gestion des collectivités territoriales, puis j’ai passé le concours d’attaché territorial.
Mon premier poste a été celui de Directrice Générale des Services (DGS) à La Tour d’Auvergne, dans une communauté de communes rurale. Cette expérience m’a passionnée et j’y suis restée près de 10 ans. En milieu rural, on apprend tout : de l’idée à la concrétisation, la mise en œuvre et le fonctionnement. Ensuite, j’ai passé deux ans à la mairie de Pérignat-lès-Sarliève. Puis, j’ai eu l’opportunité d’intégrer la nouvelle grande région lors de la fusion en 2016. Je m’occupais spécifiquement des dossiers auvergnats toute thématique confondue ainsi que des dossiers liés à l’aménagement des territoires sur l’ensemble du périmètre régional.
Ensuite, j’ai occupé un poste de responsable de service « action territoriale » : porte d’entrée de la région dans les douze départements. Enfin, il y a un peu plus d’un an, je suis devenue Directrice adjointe de l’Économie, Emploi, Relocalisations, à Clermont-Ferrand. Ce rôle est axé sur l’accompagnement des entreprises dans leur développement et la recherche de financement avec une équipe de 70 agents.
Pouvez-vous nous présenter le service Relocalisation du conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes ?
Ludivine Giral : Les régions sont chefs de file en matière de développement économique et l’une des priorités de notre exécutif est la souveraineté industrielle. Cela inclut la relocalisation des entreprises et, in fine, la création d’emplois. Nous accompagnons aussi les entreprises qui souhaitent innover et développer de nouvelles activités pour garder notre industrie en région. Il y a des raisons économiques à ces démarches, mais aussi des considérations de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) qui deviennent de plus en plus importantes dans les stratégies d’entreprises. Par ailleurs, de nombreuses entreprises de nos territoires sont conscientes de leur rôle dans le développement économique en Auvergne.
Pour autant, relocaliser, ce n’est pas simple. Les entreprises ont besoin d’être accompagnées au niveau local. Nous travaillons en étroite collaboration avec Auvergne Rhône-Alpes Entreprises pour monter des dossiers et identifier du foncier disponible pour accueillir ces entreprises. Cela facilite grandement le processus de relocalisation et d’expansion industrielle.
Comment accompagnez-vous concrètement les entreprises qui avec des projets de relocalisation en Auvergne ?
Ludivine Giral : Pour relocaliser, il y a des règles strictes, notamment au sein de l’UE où la concurrence entre entreprise doit être respectée. En revanche, en dehors de l’UE, on a plus de marge de manœuvre. Nous expertisons chaque dossier.
Lorsqu’une organisation s’interroge sur un projet de relocalisation, nous lui demandons simplement de rédiger une lettre d’intention décrivant le projet, notamment la création d’emplois, le type d’investissement. Nous nous engageons sous un mois à donner une réponse sur l’éligibilité du projet. S’il est éligible, un chargé de mission de l’agence ou de la région accompagne l’entreprise pour monter son dossier. Pour chaque dossier, nous examinons le nombre d’emplois créés et l’investissement prévu.
Le Pack Relocalisation comporte deux principaux volets : l’investissement et la formation des salariés. Nous pouvons également financer les salaires et charges de salariés de plus de 55 ans embauchés.
Concernant l’investissement matériel, nous devons respecter certaines règles en termes de pourcentage et de montants, qui varient selon la taille de l’entreprise et le secteur d’activité. Les aides sont destinées aux entreprises de toute taille (TPE, PME) et avec un encadrement plus strict pour les ETI.
Avez-vous quelques chiffres à nous donner ?
Ludivine Giral : Depuis 2022, nous avons identifié 600 projets qui sont éligibles au pack relocalisation et qui permettront de créer 12 000 emplois. Sur la période de 2022 à 2028, cela devrait représenter un investissement de 1,2 milliard d’euros et la création de 30 000 emplois. Il est important de noter que toutes les aides aux entreprises sont encadrées afin de ne pas créer de concurrence déloyale entre les pays de l’UE. Actuellement, Auvergne-Rhône-Alpes compte 520 000 emplois industriels. Ces efforts de relocalisation et de soutien aux entreprises visent à renforcer ce tissu industriel et à garantir une croissance durable et équilibrée.
Quels sont les principales difficultés à la relocalisation en Auvergne-Rhône-Alpes ?
Ludivine Giral : Il y a un véritable enjeu autour du foncier. Le ZAN (Zéro Artificialisation Nette), dont on entend beaucoup parler, impose de nouvelles restrictions. Pour trouver du foncier, la Région a pris une délibération en juin 2023 pour sanctuariser des zones d’activités avec un potentiel industriel, offrant ainsi du clé en main aux entreprises. L’agence entreprise propose un site présentant les parcelles disponibles.
Lorsqu’on qualifie ces zones, nous prenons en compte différents critères, dont la vocation industrielle, la connectivité, la proximité ferroviaire, routière ou encore la présence d’un aéroport à proximité. Certains territoires ont une vocation industrielle et souhaitent être labellisés, d’autres préfèrent conserver leurs zones à vocation artisanale : c’est d’abord un choix du territoire.
C’est l’instant carte blanche, avez-vous quelque chose à ajouter ?
Ludivine Giral : Dans nos objectifs, nous visons la simplification administrative pour les entreprises. Nous essayons d’être au plus près des entreprises et de simplifier leurs démarches, malgré la complexité inhérente à ces processus. Très souvent, il existe des aides dont les entreprises ignorent l’existence. Nous mettons tout en œuvre pour aider ces entreprises à trouver les compétences dont elles ont besoin et à réussir leur implantation.
Aides de la Région à la relocalisation de fabrications en France
Établissements Gonin
- Secteur d’activité : Meulage et affûtage de pièces techniques
- Secteur géographique : 63550 Palladuc
- Description du projet : En 2023, les établissements Gonin ont investi dans une machine spéciale d’une valeur de 577 900 €, soutenus par la Région afin de relocaliser leur production et maintenir un savoir-faire spécifique.
- Montant de l’aide : 115 580 €
SMECA 63
- Secteur d’activité : Usinage
- Secteur géographique : Clermont-Ferrand, Auvergne-Rhône-Alpes
- Description du projet : En 2023, SMECA 63 a relocalisé la fabrication de pièces de maintenance pour de grands donneurs d’ordre industriels régionaux, avec un soutien régional dans le cadre du Pack relocalisation.
- Montant de l’aide : 95 695 €
FUJI Electric France SAS
- Secteur d’activité : Fabrication de variateurs de vitesse
- Secteur géographique : Clermont-Ferrand et Cournon, Auvergne-Rhône-Alpes
- Description du projet : En 2023, FUJI Electric France a relocalisé deux productions. Ils ont doublé la fabrication de variateurs pour ascenseurs, initialement produite en Thaïlande, et relocalisé une production OEM de l’usine japonaise de Sukuka. Le coût total du projet était de 1 681 396 €, avec une aide régionale de 168 139 €.
- Montant de l’aide : 168 139 €
Maubert Mécanique
- Secteur d’activité : Usinage de pièces mécaniques
- Secteur géographique : 63650 Palladuc
- Description du projet : En 2023, Maubert Mécanique a investi 165 000 € dans du matériel de production supplémentaire pour relocaliser la production d’un de ses donneurs d’ordre. En 2022, ils avaient déjà reçu une aide sur un investissement de 200 000 € pour un projet similaire.
- Montant de l’aide : 40 000 € (2022), 33 000 € (2023)
L’Outil Parfait
- Secteur d’activité : Outillage du peintre professionnel
- Secteur géographique : 63220 Arlanc
- Description du projet : En 2022, L’Outil Parfait a relocalisé des fabrications réalisées au Portugal, en Pologne, en République tchèque et en Chine, avec un investissement total de 722 000 €, soutenu par une aide régionale.. Cette initiative a permis de privilégier les sous-traitants locaux et de maîtriser toutes les phases de fabrication des articles en marques propres.
- Montant de l’aide : 138 900 €