ROULEZ JEUNESSE ! #5 – Anaïs NATUREL et Maxime BALDASSIN

ROULEZ JEUNESSE ! #5 – Anaïs NATUREL et Maxime BALDASSIN

Par Joséphine CAPITANT

 

Une marque de vêtements écoresponsable et 100% made in Auvergne ? Ça existe grâce à Anaïs et Maxime ! Ce jeune couple est sensible depuis longtemps aux problématiques environnementales, ils décident un soir d’hiver 2018 de lancer leur projet pour changer les choses « à leur échelle ». 

 

Bonjour Anaïs et Maxime, tout d’abord, quel est votre parcours ?

Anaïs: J’ai fait un bac scientifique, pour ensuite faire un DUT physique. 

Maxime: À l’origine on est pas du tout dans le monde du textile. De mon côté j’ai fait un bac pro puis un BTS électrotechnique pour ensuite travailler 7 ans chez Enedis. Je suis parti tout récemment, au mois de mars. Notre parcours étudiant n’est pas lié à ce qu’on fait aujourd’hui. 

 

Pourquoi Youkan ?

M: On a créé Youkan il y a presque un an et demi. Initialement on consomme déjà très localement, on tend vers le zéro déchet, etc.
L’idée c’est une marque locale qui fasse fonctionner et qui puise dans toutes les économies de la région qui est un gros bassin textile.
On voulait faire une marque la plus écologique possible: alors on s’est renseigné sur le textile recyclé: l’impact est bien meilleur sur l’environnement que le textile normal. C’était décidé, on ne fera que du recyclé, et on s’est lancé ! 
Le but est aussi de grossir les rangs des marques responsables: plus les gens auront connaissance de cette solution alternative plus on pourra changer les choses.

Youkan c’est ça : tu peux changer les choses si tu le veux. 

 

C’est quoi le concept ? 

Crédits photo: site internet Youkan

M: Des habits faits à partir d’anciens qui ont été recyclés et de bouteille en plastique.

A: On récupère les habits déposés dans les bacs de tri, il va y avoir un premier tri pour déterminer si ils sont  réutilisables. Ensuite ce qui est gardé va aller chez un de nos fournisseurs qui dans un premier temps retire le superflu (étiquettes, boutons, etc.) et dans un second temps broie ce vêtement pour faire un nouveau fil à partir duquel il va faire des grandes bandes de tissus. Il nous reste à choisir la couleur pour créer notre propre vêtement. 
Avec les bouteilles plastiques c’est le même processus: le plastique est broyé en tout petits déchets pour faire la fibre. Cette fibre plastique joue dans la résistance du produit qui va être plus durable et résistant. 

 

D’où vient l’idée ? 

M: Je crois bien que ça part d’une soirée entre potes (rires), on était plusieurs depuis un petit moment à vouloir faire quelque chose en indépendant et ne plus être salarié. 
Lors de cette soirée de décembre 2018, on est parti du constat que c’était difficile de se fournir en « fabriqué Français », recyclé, etc. 

A: À chaque fois qu’on regardait l’étiquette de nos fringues il y avait « Made in China » ou « Made in Taiwan », et ça nous paraissait fou qu’on n’ait pas de produits faits en France. 

crédits photo: site internet Youkan


M: Alors on s’est dit qu’on avait qu’à le faire nous-mêmes. 
On s’est fixé l’objectif de tout faire dans la région Auvergne Rhône-Alpes. Forcément c’est un peu compliqué, quand on arrive avec ce projet de proposer un produit écologique, pas forcément à grande échelle et qui doit rester très local on nous ouvre pas forcément la porte facilement. Il a donc fallu travailler longtemps pour réussir à avoir des usines qui souhaitent nous rencontrer.

 

  

Concrètement c’est quoi votre journée type ?

M: On veut avoir la main sur les différents prestataires, c’est-à-dire ne pas se contenter d’acheter un tee-shirt sur lequel on impose notre logo, c’est pas du tout notre délire. Donc on sélectionne les tissus directement avec le prestataire qui fait les tissus. On est vraiment en contact avec toutes les différentes usines qui travaillent pour nous. On choisi le tissu directement chez le tisseur pour le faire à la demande, il ne tisse pas en avance, il n’y a pas de stock de tissu. 
Après on va être en contact avec notre confectionneur qui est basé sur Rouanne, et on va prototyper différents modèles et faire du patronage pour avoir le produit qu’on veut pour pouvoir enfin lancer la fabrication. 
A: On s’occupe aussi beaucoup des réseaux sociaux, on cherche à toujours se renouveler dans le contenu pour attirer le plus de monde, ça prend beaucoup de temps. Par exemple Max est en contact avec quelqu’un pour le festival E-Sancy, un festival éco-responsable qui aura lieu dans deux mois vers le Sancy.  

 

Pourquoi le nom Youkan ?

A: Youkan de l’anglais « tu peux », on est persuadé que chacun peut faire bouger les choses à son échelle. Ça a vraiment ce sens-là. Il faut le faire, si 7 milliards adoptent la démarche ça aura un impact. 

 

D’où part votre sensibilité pour cette cause ? 

M: Comme je le disais on était déjà dans un démarche de consommation écoresponsable avec Anaïs. Et quand on a commencé à developper Youkan on s’est beaucoup renseigné sur tout ce qui touche aux alternatives écologiques. Les algorithmes des réseaux sociaux nous ont renvoyés de plus en plus vers ce type de contenu. Donc on à été amené à renforcer nos choix de vie grâce à Youkan. 

 

Qu’en pensent vos proches ? 

M: Qu’on est un peu taré (rires)

A: Nos parents étaient les derniers mis au courant. Quand tu lances ton projet t’es pas sûr de toi, tu connais pas grand chose de ce monde. On voulait pas trop d’avis négatif du coup on leur a dit quand on avait nos prototypes (rires), quand on ne pouvait plus faire marche arrière.

M: D’ailleurs ils ont bien réagi, ils nous connaissent et savent qu’on est un peu « roots ». Ils se doutaient bien qu’il y avait quelque chose qui se tramait depuis un moment.  

crédits photo: site internet Youkan

A: On a beaucoup de potes qui sont dans ce délire un peu écolo donc ils étaient super emballés. On en a pas mal qui nous aident: notre photographe, les mannequins ou encore celle qui design les produits sont des amis, on est vraiment soutenu. 

 

 

 

Qu’est-ce que ça représente pour vous d’être dans l’accélérateur de startup le Bivouac ? 

M: C’est très récent donc c’est un peu compliqué de dire ce que ça représente maintenant.
Ça ne peut être que bien pour Youkan de développer son réseau, tout l’aspect commerce, marketing etc, donc c’est une réelle opportunité de développement.

A: Ils vont nous aider aussi sur le côté communication avec lequel on peut avoir du mal parfois.
Aujourd’hui Max à quitté son travail, mais c’est vrai qu’avant on n’avait pas forcément le temps nécessaire, donc on pouvait avoir tendance à faire les choses à la va-vite. C’est en partie pour ça que le Bivouac est un vrai soutien, ils nous apportent plein de connaissances ainsi q’un avis extérieur. C’est vrai qu’avant ça on a pas forcément eu d’avis objectifs, eux sont des professionnels donc ils posent les bonnes questions. 

 

Quelles sont les plus grosses difficultés que vous ayez rencontrées ? 

A: Le coronavirus ! (rires)
M: Je pense que la plus grande difficulté a été de lancer la première collection: trouver le bon partenaire, le bon tissu, etc. C’est la première donc il faut pas se louper ! En plus on marche au feeling, donc quand on a choisi la première usine avec laquelle on voulait travailler c’était important pour nous de rencontrer une personne qui soit dans la même démarche écologiste. Ça été long de trouver la bonne personne, on en a rencontré plusieurs. C’était encore plus difficile que la paperasse, la paperasse c’était « relou » mais pas difficile (rires).

 

Quelle a été votre première fierté ? 

M: La première commande d’une personne sur internet qu’on ne connaissait pas, qui s’est donc faite grâce aux réseaux sociaux, c’est-à-dire qu’on est allé chercher et qu’on a réussi à convaincre.

A: Je pense aussi à l’année dernière, quand on a fait les marchés de Noël. On s’est rendu compte que les gens étaient intéressés, même s’ils n’achètent pas ils comprennent ce qu’on fait. Et c’est exactement ça qu’on veut transmettre, montrer que ça existe et que c’est accessible.

 

Considérez-vous votre jeune âge comme un frein ou comme un atout ? 

M: Je pense que c’est un atout, parce qu’on est jeune et qu’on en veut.

A: Avant toute chose quand on est allé voir notre prestataire on ne nous a pas demandé notre âge, on est jeune mais vu qu’on arrive avec un discours et une vraie volonté on est assez convaincant. Donc je ne pense pas que notre âge ait été un frein. 

M: Ça a dû être un plus dans le sens on où représente la nouvelle génération. Avec le discours qu’on tient on est « les jeunes qui veulent faire bouger les choses ». 

 

Jusqu’où espérez-vous porter Youkan ? 

A: Si ça marche vraiment bien ce serait « ouf », mais on veut pas forcément faire un gros truc, on espère juste pour l’instant que Maxime puisse en vivre. 
Ouvrir une boutique ce serait « top », je parle pas forcément d’avoir 5000 points de vente, mais juste pouvoir en vivre. 

Un message qui vous tient à coeur ? 

M: Ce qu’on répète un peu tout le temps: « chaque personne peut changer les choses à son échelle »,  c’est notre leitmotiv. 

A: Quand on a lancé Youkan on savait que même si ça ne marchait pas on aura appris à certaines personnes que s’habiller écoresponsable c’est possible. Ça choque toujours les gens quand on leur dit qu’un tee-shirt normal coûte 2500 litres d’eau, les nôtres représentent 50 litres. 
De notre côté on a appris beaucoup de choses et rencontré plein de personnes, donc il n’y a rien de perdu. 

À propos de Pauline Rivière

Pauline Rivière est journaliste et rédactrice en chef du média en ligne le Connecteur. Elle est en charge du choix des dossiers spéciaux mensuels. Elle développe également des outils de datavisualisation à destination de l'écosystème de l'innovation et s'intéresse à l'innovation éditoriale. Avec sa société SmartVideo Academy, elle anime différentes formations à la réalisation de vidéos (au smartphone notamment) et à l’écriture audiovisuelle. Elle intervient également dans l'Enseignement Supérieur dans le cadre de projets pédagogiques digitaux, mêlant techniques de communication et sujets d'innovation.