Benoît Bouscarel : « Le Chantier, c’est un modèle de radio basé sur l’insertion et donc sur l’ouverture totale de sa rédaction à la société diverse »

Benoît Bouscarel : « Le Chantier, c’est un modèle de radio basé sur l’insertion et donc sur l’ouverture totale de sa rédaction à la société diverse »


Le 25 novembre dernier, l’organisme de formation l’Onde Porteuse a fêté ses 5 ans d’existence. Aujourd’hui, Benoît Bouscarel et Charlotte Waelti les cofondateurs, se lancent un nouveau défi. Le 8 janvier prochain sur le 98 Fm, une nouvelle radio verra le jour : Le Chantier. Derrière ce projet, c’est un nouveau rapport à l’information qui est proposé.
Rencontre avec Benoît Bouscarel, Rédacteur en Chef week-end de France Culture qui vient de prendre un congé sans solde d’un an pour se consacrer au Chantier.

Avant de parler du lancement de la nouvelle radio FM, le Chantier, rappelle-nous d’abord la naissance de l’Onde Porteuse.

Avec Charlotte, nous venons du monde de la radio associative. J’étais un des fondateurs de Radio Campus Clermont en 1996 et c’est là que nos chemins se sont croisés. Nos parcours nous ont emmenés aux quatre coins de France. En montant l’Onde Porteuse, on répondait à cette envie de monter un projet autour de la radio. Nous ne pensions pas que cela prendrait une telle ampleur.

Et quelle était l’idée de départ ?

Il existe plus de 600 radios associatives en France. C’est un vivier formidable de diversités. Ce sont des médias de proximité qui donnent la parole aux citoyens.
Nous avions identifié une problématique qui se pose dans de nombreuses radios associatives : le problème de la formation et des compétences présentes sur les territoires. L’enjeu fondamental était de pouvoir former des professionnels qualifiés.

Aujourd’hui, l’Onde Porteuse est notamment reconnue pour être aussi un chantier d’insertion. Comment est né ce projet ?

C’est par le hasard d’une rencontre avec une association d’insertion que nous est venue l’idée d’insérer professionnellement par la radio des publics éloignés de l’emploi. Aujourd’hui, notre atelier chantier d’insertion emploie 8 personnes qui sont pré-repérées par Pôle Emploi ou par d’autres institutions comme la Mission Locale.

Et donc maintenant 2021, nouveau projet. Nous avons reçu la carte postale qui annonce le lancement de votre radio “Le Chantier” en janvier. Raconte-nous un peu…

Lorsqu’en 2017, on lance le chantier d’insertion, très rapidement, on nous demande où l’on peut écouter les émissions. On décide de proposer les contenus en podcasts et de faire une webradio. Il se trouve qu’en 2018, le CSA lance un appel à candidatures pour une fréquence disponible, le 98 FM. On a postulé et le 8 janvier prochain, nous lancerons officiellement le chantier sur le 98 FM à Clermont.

Quelle sera la ligne éditoriale ?

Avant de parler ligne éditoriale, il est vraiment très important de préciser que la programmation va être proposée par nos salariés en insertion, mais cela ne se ressentira pas à l’antenne.
Ce sera une vraie radio, avec des programmes informatifs et une programmation musicale de qualité. Nous proposerons des programmes locaux et également nationaux.

Quant à la ligne éditoriale, elle tournera autour de trois axes : d’abord la culture, parce que nous pensons que c’est un élément fondamental du vivre-ensemble, puis le social et l’environnement.
Aujourd’hui, on ne peut pas monter un média responsable sans évoquer les sujets liés à la protection de l’environnement. Le volet social en découle, car on ne peut pas dissocier l’environnement du social. C’est la fameuse question : la fin du monde versus la fin du mois.

On reproche aux médias nationaux  dits “classiques” de ne pas représenter la société. Y a t il une part de vérité dans ce postulat ? 

Il faut reconnaître que les rédactions parisiennes rassemblent beaucoup… de parisiens. Les différents groupes sociaux qui les composent sont assez homogènes. C’est une réalité, c’est documenté. Il y a des efforts qui sont faits notamment au sein des écoles de journalisme, mais changer les mœurs prend du temps.
Personnellement, je dirais que ma façon de me rendre compte que la vie n’est pas entièrement contenue à l’intérieur du périphérique parisien, c’est justement de revenir à Clermont et de monter des projets.

C’est la question que l’on pose à tous nos invités : C’est quoi pour toi bien s’informer ?

Bien s’informer, c’est avant tout exercer son esprit critique. Ça passe par la pluralité, je crois. Écouter une radio, et peut-être en écouter une autre qui paraît assez éloignée. 
Lire plusieurs titres de presse, ne pas se contenter de la lecture d’un article d’un éditorialiste. On peut se nourrir de ce qui a été écrit par un éditorialiste, mais il faut aussi aller voir les articles de fond qui sont dans d’autres organes de presse et ne pas faire confiance aveuglément.
Et surtout ! Surtout douter de ce qu’on lit quand ça ne vient pas d’une rédaction qui a fait ses preuves, qui a une antériorité. Lorsque l’on parle de douter, ce n’est pas forcément négatif, au contraire, c’est un exercice très intéressant.

Chaque journaliste a une manière particulière d’aborder l’éducation aux médias. Comment intervenez-vous avec l’Onde Porteuse ?

De notre point de vue, éduquer aux médias, c’est d’abord écouter et essayer de comprendre. Avant de dire, il faut écouter, avant d’écrire, il faut lire. C’est ce que nous construisons à travers nos ateliers d’éducation aux médias. 
Quant au complotisme, grand enjeu d’éducation, je dirais que finalement ça a toujours existé. C’est l’instrumentalisation politique du mensonge. C’est un combat éternel qui ne sera jamais gagné. On peut et on doit se battre mais il faut accepter le constat.

source : leradiofil.com

Pour terminer, comment est-ce que tu vois 2021 ?

En 2021, la radio en France aura 100 ans puisque c’est en 1921 que Radio Tour Eiffel, la radio nationale a lancé sa première émission. En 1981, sont apparues les premières radios libres.
On pourrait donc imaginer que 100 ans après l’arrivée de la radio et quarante ans après l’arrivée de la radio libre, on assiste le 8 janvier 2021 à Clermont-Ferrand à l’avènement d’un nouveau modèle de radio. Un modèle de radio basé sur l’insertion et sur l’ouverture totale de sa rédaction à la société diverse.
D’ailleurs, nous sommes en train d’accompagner un projet similaire en Seine-Saint-Denis et un autre à Mayotte et nous en sommes très fiers.

Dans la tête de Benoît Bouscarel

Un nouveau format qui te laisse pas indifférent :  Le format Brut. Ça change le rapport à l’information et c’est assez intéressant 
Ton média préféré  : le livre 
Le petit média qui monte : radio Le Chantier 
Où vas tu vas à la pêche à l’info ? : Beaucoup sur Twitter et je suis aussi abonné à pas mal de titres de presse 
Une recommandation : Ma vie de cafard, c’est un livre de Joyce Carol.
C’est toute la suffisance et toute la mauvaise foi d’un pan de la société américaine qui sont vues à travers les yeux d’une fillette 
Un voeu pour 2021 : Que les bars rouvrent. Qu’ils rouvrent le plus vite possible avec les restaurants.  Ne pas pouvoir manger et boire un coup c’est quand même hyper triste

À propos de Pauline Rivière

Pauline Rivière est journaliste et rédactrice en chef du média en ligne le Connecteur. Elle est en charge du choix des dossiers spéciaux mensuels. Elle développe également des outils de datavisualisation à destination de l'écosystème de l'innovation et s'intéresse à l'innovation éditoriale. Avec sa société SmartVideo Academy, elle anime différentes formations à la réalisation de vidéos (au smartphone notamment) et à l’écriture audiovisuelle. Elle intervient également dans l'Enseignement Supérieur dans le cadre de projets pédagogiques digitaux, mêlant techniques de communication et sujets d'innovation.