Yan Bailly: seuls, on ne fait jamais mieux.

Yan Bailly: seuls, on ne fait jamais mieux.

Le Connecteur est un média associatif. Son conseil d’administration est donc le creuset du projet global. Une série de portraits pour comprendre ce qui rassemble ceux qui ont eu envie de rejoindre- ou poursuivre – l’aventure. Chacun a répondu aux mêmes questions: son lien au territoire, le sens de l’innovation, ses envies, ses valeurs, … avec sa sensibilité. Cette semaine c’est  Yan Bailly qui répond à nos questions.

Yan Bailly, c’est le comparse de Fred Domon. Ils se sont rencontrés il y a quelques années en étant tous les deux investis dans des démarches citoyennes territoriales. La rencontre les a amenés à s’associer dans une première société puis CIKABA aujourd’hui. Il n’apprécie pas vraiment les titres officiels. Avec son associé, ils sont sur tous les fronts et ça ne rentre pas sur une carte de visite. Ce qu’il veut avant tout, c’est être là pour les équipes. 

Son parcours démarre avec des études en technologie médicale, et beaucoup d’informatique, d’électronique, de robotique. Ses études étaient donc déjà multidisciplinaires jusqu’à sa thèse ‘Modélisation et commande d’un micro-robot hybride : application à la pose d’endoprothèses aortiques en chirurgie mini-invasive’

Son intérêt: allier différentes thématiques pour atteindre un but, en l’occurrence, utiliser l’intelligence artificielle et la robotique pour un progrès dans le domaine médical. Ses premières expériences l’ont conduit vers des fonctions de R&D dans la technologie médicale, puis vers des postes d’organisation de structures porteuses de l’innovation vers les marchés, notamment internationaux. 

Finalement, on retrouve un peu de tout ça dans Cikaba !

Yan, qu’est ce qui t’anime par rapport à cette question de territoire(s) ?

J’ai vécu dans différents lieux, en France et dans le monde (à Hong Kong, au Canada, à Grenoble, …) et à chaque fois, je suis frappé de l’écart entre la vision, souvent déformée et réductrice, que l’on peut en avoir avant d’y vivre. J’aime bien garder cette  expérience à l’esprit quand je pense au territoire dans lequel je vis aujourd’hui. Se mettre à la place de celui qui arrive, de ce qu’il doit apprendre, découvrir, décoder pour s’intégrer. 

Chaque territoire a des richesses et souvent les stéréotypes prennent le dessus. C’est néfaste pour le développement de ces territoires. Ils ont besoin de valoriser leurs atouts.

C’était ce constat qui nous a amenés à créer Le connecteur. En 2015-2016, il n’y avait pas vraiment d’initiatives citoyennes dans cet objectif. En tout cas sans lien institutionnel ou politique et nous avions très envie de capitaliser sur un nouvel événement que nous jugions majeur: la première édition d’un Tedx Clermont, qui a mobilisé beaucoup d’enthousiasme et de bénévoles. A ce moment-là, nous y avons vu l’opportunité de  connexions à établir.

Et puis il y avait l’idée de ne pas penser qu’on ferait mieux tout seul et donc de plutôt s’appuyer et capitaliser sur ce qui est fait sur le territoire.

Le territoire, pour moi, ce n’est pas administratif mais relationnel. Ce qui fait un territoire c’est la proximité du quotidien. La capacité à nouer des liens, à partager une histoire,  des dynamiques, des connexions … Ce n’est donc pas figé et surtout pas unique, c’est une somme de liens réels entre des individus, autour de projets communs. Notre rencontre avec Fred s’est faite par l’intermédiaire d’Auvergne Nouveau Monde, il y avait cette volonté d’ouvrir l’initiative à des “ressources” externes, des citoyens qui avaient envie de participer. C’est comme ça que se créent les projets, par des contacts réels, par des valeurs communes que l’on reconnaît … tout est lié.

L’enjeu : l’innovation, ça devrait servir à…?

Fondamentalement, à faire mieux. Rendre le monde meilleur, pour notre quotidien comme pour le plus long terme. C’est beau comme un arc-en-ciel dit comme ça mais Innover pour innover n’a, à mon sens, aucun intérêt. C’est ce qui me motivait dans ma thèse par exemple, le fait de contribuer à améliorer la prise en charge des patients. Ça a du sens. Et c’est toujours le cas, avec Cikaba on travaille à réduire les accidents en entreprise.

Je pense aussi qu’il faut faire preuve d’humilité : l’innovation n’a pas forcément de valeur dans l’absolu. Ce qui est innovant dans un cercle ou un secteur ne l’est pas forcément ailleurs mais ça n’en réduit pas la valeur.

Enfin je pense qu’il faut encourager toute l’innovation. Les cas d’usages et les défis à résoudre pour l’avenir supposent des approches tout azimut, sans opposer les formes de solutions, sans en laisser de côté. Il n’y aura pas de réponse unique aux grands enjeux mais des combinaisons de solutions. Il faut les encourager. 

Pour toi, Yan, quelles valeurs faut-il défendre ?

Pour faire écho aux origines du Connecteur, je dirais défendre l’esprit de la collaboration. Et l’appliquer : ne pas penser qu’on peut faire mieux seul, ce n’est jamais vrai. 

C’est une posture volontaire aussi : le travail d’équipe se construit. Il faut lutter contre le naturel individualiste. Il faut aussi garantir la transparence et l’honnêteté, qui sont des pré requis pour bâtir une vraie collaboration. Ce qui se passe souvent dans les initiatives institutionnelles et politiques, les objectifs officiels apparaissent identiques mais les réelles intentions ne sont pas affichées.

Le fait d’avoir des objectifs différents n’est pas en soi un problème mais s’ils ne sont pas formulés, cela parasite évidemment le travail et mène le plus souvent  à l’échec.

Rapportée à un média, la question des valeurs à défendre me semble se concentrer sur la nécessité d’apporter des  éclairages objectifs, sans parti-pris. C’est nécessaire à un débat public sain de connaître, d’exposer clairement les choses, sans sur-promettre. 

L’esprit de la collaboration

Et puis pour Le Connecteur spécifiquement, il faut porter la valeur de collaboration. La cartographie me paraît être un bon exemple : c’est une bonne façon de permettre le repérage d’acteurs intéressants et d’initier des rencontres. 

C’est aussi une vitrine de ce qui se passe sur le territoire qui permet d’identifier les dynamiques. On pourrait tout à fait imaginer aller plus loin en proposant des appels à contribution ou à projets quand on repère un besoin ou une opportunité. 

Une action collective à laquelle tu participes et dont tu es fier ?

Aujourd’hui, j’ai deux petites terreurs desquelles m’occuper à la maison en plus  d’une start up en pleine accélération à gérer. Je suis moins disponible pour le collectif mais j’y reviendrai. Ma fierté est d’être à l’initiative du Connecteur. C’était une belle aventure, très stimulante, d’imaginer quelque chose à plusieurs, puis de le mettre sur les rails.  C’est aussi assez  satisfaisant de voir plus de 5 ans après, avec différentes phases et une route sinueuse, que les valeurs originelles sont toujours respectées, que l’oisillon prend son envol et qu’il est sur la bonne trajectoire. 

Des trajectoires d’ailleurs, il y en a toujours plusieurs possibles, c’est difficile à évaluer mais justement, ce à quoi on prête attention, c’est l’alignement par rapport aux valeurs et ambitions initiales et la pérennité – financière notamment- de la structure. Pour l’heure, les indicateurs sont plutôt encourageants. 

Des trajectoires d’ailleurs, il y en a toujours plusieurs possibles, c’est difficile à évaluer mais justement, ce à quoi on prête attention, c’est l’alignement par rapport aux valeurs et ambitions initiales et la pérennité – financière notamment- de la structure. Pour l’heure, les indicateurs sont plutôt encourageants. 

Concernant les projets du Connecteur, sur quoi aurais-tu envie de t’investir ?

Comme je le disais précédemment, je n’ai plus beaucoup de “bande passante” disponible mais ça reviendra j’espère 😉 

J’ai confiance dans la capacité du Connecteur à porter des projets  intéressants. Il est pleinement ancré dans les communautés innovantes du territoire et dans une posture de soutien et de mise en valeur. Il est utile.

Le meilleur conseil jamais reçu ?

Jamais plus haut que le bord ! 

Plus sérieusement, pour moi, un bon conseil est contextuel, c’est rarement un truc qui fonctionne à tous les coups… Je dirais malgré tout  “ il y a surtout une expérience à acquérir “, cette idée d’être à l’écoute des autres pour absorber l’expérience.

Ton plus bel échec ?

Le mot échec n’a pas vraiment de sens pour moi. On réussit plus ou moins bien mais utiliser le mot signifierait que je n’aurai pas digéré et justement pas utilisé l’expérience. Donc si je réussis moins bien, j’essaie de faire mieux la fois d’après !

Ton épitaphe de rêve ?

Pas d’épitaphe, la vie éternelle !

Tes respirations/ inspirations : lectures, podcasts, …

Pat patrouille 😉

 

 

 

Les autres portraits déjà parus

 

Claire Antoine: faciliter la collaboration.

Damien Caillard: journalisme, environnement et … bilboquet.

 

Virginie Rossigneux. Favoriser la controverse.

Emmanuelle Collin. Bousculer les croyances limitantes.

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À propos de Véronique Jal

Ma ligne guide depuis 15 ans, c'est le management de projets collectifs à fort "sens ajouté" : les fromages AOP, les hébergements touristiques, la démarche d'attractivité d'une région... et aujourd'hui l'innovation territoriale via un média associatif Toulousaine d'origine, j'ai découvert et choisi l'Auvergne que mon parcours pro m'a amenée à connaître sous plein de facettes. J'adore cette activité qui nous permet d'être en situation permanente de découverte.